Article N° 2990

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Trop de potassium dans le sang : quelles conséquences ?

Zitouni Imounachen, docteur en pharmacie - 30 décembre 2013 23:15

La concentration de potassium dans le plasma sanguin est normalement comprise entre 3,6 et 5 mmol/l (130 à 200 mg/l). La répartition du potassium dans l'organisme est très inégalitaire puisque sa concentration dans les cellules varie de 90 à 150 mmol/l. L'alimentation apporte environ chez un adulte 60 à 120 mmol de potassium par jour. Les aliments les plus riches en potassium sont les fruits, les légumes et le chocolat. Le potassium ingéré est en quasi-totalité absorbé dans le tube digestif et se retrouve dans les urines en quantité équivalente à celle absorbée dans l'intestin.

L'hyperkaliémie provient soit d'un défaut d'excrétion rénale du potassium, soit d'un passage accru du potassium cellulaire dans le compartiment extracellulaire. Les hyperkaliémies d'origine rénale surviennent en cas d'insuffisance rénale ou, sur reins sains, si la sécrétion d'aldostérone, une hormone sécrétée par le cortex (partie superficielle) des glandes surrénales est insuffisante.

L'insuffisance rénale aiguë ou chronique est la cause principale des hyperkaliémies et la seule cause des hyperkaliémies élevées. Dans le premier cas, elle peut être aggravée par la destruction tissulaire (cytolyse), comme cela est observé dans le syndrome d'écrasement musculaire fréquent dans les catastrophes naturelles, tremblements de terre par exemple. Dans le deuxième cas, elle apparaît au terme de la maladie, c'est-à-dire lorsque le nombre de néphrons fonctionnels devient insuffisant et est favorisée par l'acidose (diminution du pH) avec laquelle elle coexiste souvent. Elle peut aussi survenir accidentellement lorsqu'un excès alimentaire de potassium a été ingéré ou lorsque des diurétiques d'épargne du potassium ont été malencontreusement prescrits.

Les hyperkaliémies par insuffisance de sécrétion d'aldostérone s'observent dans l'insuffisance corticosurrénalienne lente encore appelée maladie d'Addison. L'hyperkaliémie est associée à une hypokaliurie (diminution de la quantité de potassium excrété dans les urines), à une hyponatrémie (diminution de la concentration de sodium dans le plasma) et à une augmentation de la rénine du plasma. Enfin, les hyperkaliémies d'origine rénale peuvent succéder à la prise de médicaments, essentiellement ceux qui bloquent l'action de l'aldostérone, ceux qui inhibent la réabsorption du sodium par le canal épithélial à sodium du néphron distal et, de ce fait, inhibent aussi le passage du potassium dans l'urine et tous ceux diminuant la sécrétion d'aldostérone, comme les inhibiteurs de l'enzyme de conversion ou les antagonistes des récepteurs de l'angiotensine II. Dans tous ces cas, l'hyperkaliémie est associée à une hypokaliurie.

La deuxième grande cause d'hyperkaliémie est l'augmentation du passage de potassium de la cellule vers le compartiment extracellulaire auquel appartient le plasma. Deux causes sont à l'origine de ce dysfonctionnement: la destruction, habituellement par nécrose, d'un grand nombre de cellules et l'acidose qui facilite la sortie du potassium du compartiment cellulaire. Il convient, enfin, de citer une cause exceptionnelle d'origine génétique, la paralysie périodique avec hyperkaliémie ou maladie de Gamstorp qui provoque des accès aigus d'hyperkaliémie avec paralysie musculaire.

Le traitement de l'hyperkaliémie dépend de sa sévérité et de son origine. Lorsqu'elle atteint ou dépasse 7 mmol/l, ce qui se voit quasi exclusivement dans l'insuffisance rénale, l'hémodialyse s'impose d'urgence afin de débarrasser rapidement le compartiment extracellulaire du potassium en excès pour éviter la mort subite par accident cardiaque. Dans l'attente ou dans l'impossibilité d'hémodialyse, des traitements de substitution doivent être mis en route: injection de gluconate de calcium pour diminuer l'hyperexcitabilité, injection d'insuline et perfusion de bicarbonate de sodium pour transférer le potassium vers le compartiment cellulaire, lavements de résine fixant le potassium dans l'intestin.

La survenue d'une hyperkaliémie associée à une acidose, si elle n'est pas accidentelle, à la phase ultime de l'insuffisance rénale chronique impose la mise en route d'un programme de dialyses chez le patient. La prévention de l'hyperkaliémie chez les malades en insuffisance rénale chronique peut être obtenue par le régime «sans potassium», la prescription de diurétiques favorisant l'élimination du potassium (diurétiques de l'anse de Henle) et de médicaments captant dans l'intestin le potassium alimentaire et empêchant ainsi son absorption. Le traitement de l'insuffisance corticosurrénalienne est assuré par les hormones déficitaires, minéralo- et gluco-corticoïdes.

Source : http://sante.lefigaro.fr