Article N° 8190
SIT-IN
Prix du médicament : quand la soutenabilité des caisses menace celle des pharmacies
Abderrahim Derraji - 15 septembre 2025 09:02Sous l’appel de la Confédération des syndicats des pharmaciens du Maroc (CSPM), des centaines de pharmaciens, blouses blanches et brassards noirs, se sont rassemblés mardi dernier devant le ministère de la Santé et de la Protection sociale. Les banderoles brandies par les participants au sit-in résument les maux qui gangrènent la pharmacie, mais en réalité, c’est le projet de décret relatif à la fixation des prix des médicaments qui a mis le feu aux poudres. L’équation à résoudre se résume comme suit : comment concilier la survie des pharmacies d’officine, l’accès des patients à des traitements de qualité et la soutenabilité du système d’assurance maladie ?
Le projet de décret actuellement à l’étude au ministère vise à réduire, coûte que coûte, le prix des médicaments. Les pharmaciens ne s’opposent pas au déploiement de ce projet, à condition que les baisses ciblent en priorité les médicaments budgétivores déjà identifiés par la tutelle. Les officinaux refusent également que ces réductions s’accompagnent d’un effondrement de leurs revenus. Après tout, quel actif accepterait une baisse drastique de ses revenus sans réagir ?
Là où l’administration brandit des chiffres rassurants, les pharmaciens présentent des bilans fragiles et vulnérables. Derrière les marges brutes réglementaires de 33,93 % et 29,74 % perçues respectivement sur les médicaments T1 et T2, se cache une réalité bien moins reluisante : une marge nette qui dépasse rarement 6 à 10 % une fois déduits loyers, salaires et fiscalité. Ce que l’État considère comme un matelas confortable n’est en réalité qu’un fil de funambule. Et si les prix baissent mécaniquement, sans compensation, l’équilibre économique des officines risque de s’effondrer.
La menace est d’autant plus sérieuse que la rémunération des pharmaciens ne comporte ni honoraires ni indemnités, comme c’est le cas ailleurs. Et même les traitements coûteux (T3 et T4), tels que les anticancéreux ou les médicaments destinés aux maladies chroniques, sont souvent absents des pharmacies de quartier. Ils restent concentrés dans les hôpitaux, les cliniques privées ou une poignée d’officines. Les pharmaciens redoutent ainsi d’être réduits au rôle de simples distributeurs de médicaments à faible prix, condamnés à rogner sur leurs marges jusqu’à l’asphyxie.
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Ils s’interrogent aussi : pourquoi concentrer l’effort d’économies presque exclusivement sur le médicament, qui représente 34 % des dépenses de la CNSS, et ignorer d’autres postes lourds qui expliquent un reste à charge anormalement élevé au Maroc ? Radiologie, hospitalisations, analyses biologiques ou honoraires médicaux. À cela s’ajoutent une gouvernance perfectible, un manque de transparence, une digitalisation à la traîne, un défaut de statistiques fiables et l’absence d’études d’impact permettant de piloter le secteur tout en maîtrisant les risques.
En réalité, la colère dépasse la seule question des prix. Les pharmaciens dénoncent la prolifération de la vente illégale de médicaments, le flou autour des compléments alimentaires, des arrestations jugées abusives et, plus grave encore, l’absence d’élections des Conseils de l’Ordre depuis 2017, privant ainsi la profession de régulation, d’un porte-parole crédible et d’une institution clé pour faire évoluer le secteur. À l’évidence, le modèle actuel est arrivé à bout de souffle et doit être repensé pour redonner au pharmacien sa véritable place de professionnel de santé, loin de l’image réductrice du simple commerçant.
Face aux pharmaciens, le ministère de la Santé plaide l’intérêt général. Oui, certains médicaments restent chers au Maroc au regard du pouvoir d’achat. Oui, il faut encourager la production locale, stimuler la concurrence et rationaliser la dépense publique. Mais la vraie réforme ne peut se réduire à une mécanique de marges et de décrets. Elle suppose un équilibre subtil entre protection sociale, viabilité économique des officines et d’autres acteurs du secteurs et accessibilité géographique des médicaments.
Au fond, la question demeure : qui faut-il sauver en priorité ? Les caisses d’assurance maladie, confrontées à l’explosion du nombre d’assurés, à la hausse des maladies chroniques et au coût croissant des nouvelles molécules ? Ou les pharmacies de quartier et des petites agglomérations, premier recours du patient marocain, mais menacées de disparition si leur chiffre d’affaires subit trop de pression ? Répondre à cette équation, c’est trancher entre deux fragilités. C’est aussi, peut-être, l’occasion d’imaginer un modèle plus juste, plus clairvoyant et en phase avec la vision du Souverain. Un modèle où santé publique et santé économique cesseraient enfin d’être antagonistes.
En réalité, la colère dépasse la seule question des prix. Les pharmaciens dénoncent la prolifération de la vente illégale de médicaments, le flou autour des compléments alimentaires, des arrestations jugées abusives et, plus grave encore, l’absence d’élections des Conseils de l’Ordre depuis 2017, privant ainsi la profession de régulation, d’un porte-parole crédible et d’une institution clé pour faire évoluer le secteur. À l’évidence, le modèle actuel est arrivé à bout de souffle et doit être repensé pour redonner au pharmacien sa véritable place de professionnel de santé, loin de l’image réductrice du simple commerçant.
Face aux pharmaciens, le ministère de la Santé plaide l’intérêt général. Oui, certains médicaments restent chers au Maroc au regard du pouvoir d’achat. Oui, il faut encourager la production locale, stimuler la concurrence et rationaliser la dépense publique. Mais la vraie réforme ne peut se réduire à une mécanique de marges et de décrets. Elle suppose un équilibre subtil entre protection sociale, viabilité économique des officines et d’autres acteurs du secteurs et accessibilité géographique des médicaments.
Au fond, la question demeure : qui faut-il sauver en priorité ? Les caisses d’assurance maladie, confrontées à l’explosion du nombre d’assurés, à la hausse des maladies chroniques et au coût croissant des nouvelles molécules ? Ou les pharmacies de quartier et des petites agglomérations, premier recours du patient marocain, mais menacées de disparition si leur chiffre d’affaires subit trop de pression ? Répondre à cette équation, c’est trancher entre deux fragilités. C’est aussi, peut-être, l’occasion d’imaginer un modèle plus juste, plus clairvoyant et en phase avec la vision du Souverain. Un modèle où santé publique et santé économique cesseraient enfin d’être antagonistes.
Source : PharmaNEWS