Article N° 6592

ACCÈS AUX SOINS

Pas de chance, pas de médicaments !

Abderrahim DERRAJI - 05 janvier 2020 21:50

Par un communiqué du 26 décembre dernier, le ministre de la Santé, Khalid Ait Taleb, a annoncé que la prise en charge des maladies cancéreuses, pour les enfants de moins de cinq ans ne bénéficiant pas d’assurance maladie obligatoire, sera gratuite.

On ne peut que saluer cette décision même si on regrette que l’âge limite des bénéficiaires de cette gratuité soit fixé à 5 ans. Cette limitation, qui est probablement liée aux ressources allouées à ces prises en charge, ne peut être recevable par des parents ayant des enfants malades âgés de plus de cinq ans. Ces enfants ont eu la malchance d’être affectés par une pathologie lourde et la malchance de ne pas pouvoir disposer de traitements anticancéreux.

Ce problème d’accessibilité se pose également dans les pays riches, mais uniquement pour les produits particulièrement coûteux, à l’exemple du Zolgensma®. Ce médicament mis sur le marché par le laboratoire suisse Novartis coûte 1,9 million d'euros pour une injection unique. Ce médicament est destiné aux enfants atteints d’amyotrophie spinale (SMA), maladie qui affecte chaque année entre 6.000 et 10.000 enfants à travers le monde. Cette pathologie rare est due à une mutation génétique qui provoque l'atrophie des muscles des quatre membres et du tronc. Dans sa forme la plus sévère, l'espérance de vie des bébés touchés n'excède guère les deux ans.

Le laboratoire Novartis vient d’annoncer son intention d’offrir Zolgensma® à cent bébés condamnés qui seront tirés au sort. Quelque 50 doses seront mises à leur disposition d’ici juin. Quant aux doses restantes, elles seront livrées avant la fin 2020.

Ce tirage au sort que certaines associations de patients ont qualifié de «Roulette russe», Novartis le justifie par un souci d’équité afin de ne pas favoriser un enfant ou un pays au détriment d’un autre.

Eu égard au prix du Zolgensma®, des pays comme le nôtre n’ont aucune chance de pouvoir le mettre à la disposition des malades, à moins qu’un bébé ou deux ne soient tirés au sort par Novartis. Pour les autres bébés, on les mettra sur le compte du «mektoub». Par contre, dans un pays où l’article 31 de la Constitution prévoit la mobilisation de tous les moyens pour faciliter l'égal accès des citoyennes et des citoyens aux conditions leur permettant de jouir des droits aux soins de santé, on peut difficilement admettre qu’un enfant de plus de cinq ans ou un adulte soient emportés par un cancer qui peut être soigné par des médicaments efficaces et dont les prix sont dans bien des cas abordables !

Source : PMA