Article N° 8088

PESTICIDES

Pesticides : mise en garde majeur de l’Anses

Abderrahim Derraji - 25 avril 2025 11:45
L’Anses (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail - France) vient de publier une mise en garde majeure concernant les effets des pesticides sur la santé. Ce signal d’alerte, diffusé à travers deux notes de veille rendues publiques le 24 avril 2025, souligne la gravité des conséquences sanitaires potentielles de l’exposition aux pesticides, en particulier chez les enfants, mais aussi chez les professionnels manipulant ces substances.
 
L’Agence émet quatre alertes sanitaires qualifiées de sérieuses, signalant des situations où la menace pour la santé humaine est avérée et nécessite des réponses adaptées. L’alerte principale porte sur l’exposition prénatale aux pyréthrinoïdes, des insecticides largement utilisés dans l’agriculture et les répulsifs anti-moustiques. Cette exposition serait liée à des troubles du comportement chez les enfants, comme l’anxiété ou la dépression. L’Anses considère ce lien comme suffisamment solide pour appeler à une vigilance renforcée.

Une autre alerte concerne les insecticides organophosphorés, associés à une altération des fonctions motrices, cognitives et sensorielles chez les enfants exposés avant la naissance. Bien que leur usage ait fortement reculé en Europe, les organophosphorés continuent de représenter un risque pour les enfants, notamment dans certaines zones ou pour des usages spécifiques.
 
Les professionnels du secteur agricole sont aussi concernés.  L’exposition chronique à ces substances, notamment aux organophosphorés, est associée à des troubles cognitifs et à l’apparition de lymphomes non hodgkiniens, une forme de cancer du système lymphatique. Ces constats viennent s’ajouter à des décennies de débats scientifiques autour des risques professionnels liés à l’utilisation de pesticides.
Outre ces alertes, l’Anses identifie plusieurs «signaux validés», des associations moins certaines mais jugées préoccupantes. Il s’agit notamment de cas de lymphomes non hodgkiniens chez les travailleurs exposés au glyphosate, au 2,4-D ou aux triazines. D’autres études pointent un lien entre la deltaméthrine et certaines formes de leucémies, ou encore entre l’exposition prénatale aux organophosphorés et des troubles du spectre autistique. On retrouve également une préoccupation croissante autour de la qualité du sperme dans la population générale, en lien avec les pyréthrinoïdes.
 
Ces signaux doivent être considérés comme des avertissements nécessitant une gestion rigoureuse pour éviter à terme des crises sanitaires. Une attention particulière est accordée aux pyréthrinoïdes, particulièrement problématiques pour le développement neurologique des enfants. Des données récentes montrent une imprégnation importante de la population française à ces produits, avec des concentrations souvent plus élevées chez les enfants que chez les adultes.

Ce constat alarmant s’explique notamment par l’usage répandu de ces insecticides dans les produits domestiques. Bien qu’ils soient censés être peu toxiques à faible dose, leur impact sur le cerveau en développement suscite de sérieuses inquiétudes. Ces substances sont présentes dans l’environnement immédiat des enfants : maison, jardin, école, voire alimentation. La question de l’exposition chronique à faibles doses revient ainsi au cœur du débat.

L’Anses appelle à des réponses rapides. Il ne s’agit plus seulement d’observer ou de collecter des données, mais de mettre en place des politiques concrètes de prévention, d’interdiction ciblée et de substitution. Les. recommandations incluent un renforcement de la surveillance, une meilleure information des usagers et un soutien accru aux professionnels pour la transition vers des alternatives moins nocives.
 
La publication de ces alertes, inédite par leur ampleur et leur ton, souligne un tournant dans l’approche sanitaire des produits phytosanitaires. Face à l’ampleur des signaux, le statu quo n’est plus envisageable. Les décideurs publics sont désormais interpellés sur leur responsabilité à agir rapidement pour protéger la santé des populations, et notamment celle des plus jeunes, face à un risque que la science ne peut plus ignorer.
 

Source : huffingtonpost.fr