Article N° 7622

PSYCHOTROPES

Psychotropes : Tout n’est pas laxisme !

Abderrahim Derraji - 19 juin 2023 13:08

Comme nous l’avons rappelé dans nos précédents éditoriaux, les pharmaciens ont de plus en plus de difficultés à délivrer les psychotropes. Et on ne peut que déplorer le nombre, de plus en plus élevé, de confrères qui ont des démêlés avec la justice pour avoir délivré des produits contenant des substances psychoactives sans se conformer aux lois en vigueur.

Dans certains cas, les personnes impliquées, qu’ils soient pharmaciens ou employés en pharmacie, sont «impardonnables». Les sanctions dont ils écopent constituent le seul moyen pour éviter l’usage inapproprié de certains traitements. Mais dans de nombreux cas, les pharmaciens sont plutôt de bonne foi, et s’ils transgressent les lois anachroniques qui régissent la délivrance des médicaments, c’est pour «dépanner» un patient à court de traitement, ou par ce qu’ils se sont fait avoir par des trafiquants qui utilisent tous les moyens pour déjouer leur vigilance.

Ce que ne semblent pas cerner les juges qui traitent les affaires liées à ces substances, c’est que tout n’est pas forcément noir ou blanc ! Le gris est souvent de la partie. Avancer une boîte à un patient ne doit pas forcément être assimilé à un trafic de substances illicites ! D’ailleurs, le Code de déontologie des pharmaciens stipule dans son troisième article : «Hors le seul cas de force majeure, le pharmacien doit, dans la limite de ses connaissances, porter secours à un malade en danger immédiat, si des soins médicaux ne peuvent lui être assurés».

Bien souvent, les patients vivant avec une pathologie psychiatrique sont stigmatisés, voire ostraciser. Cela devrait inciter les professionnels de santé à ne ménager aucun effort pour qu’ils soient traités comme les autres malades et surtout pour leur garantir un accès à leurs médications.

Les spécialités pharmaceutiques faisant l’objet de mésusages sont connues et ne sont pas si nombreuses que ça et les pharmaciens ne comprennent pas pourquoi on doit avoir les mêmes exigences vis-à-vis de tous les psychotropes. La logique voudrait qu’un malade épileptique ne soit pas privé de valproate ou de carbamazépine (…), d’autant plus que ces traitements ne font pas l’objet de mésusage. Bien entendu, ce renouvellement doit être encadré par la loi. Il ne peut être fait qu’à titre exceptionnel, au maximum une fois et pas pour tous les médicaments.

Pour conclure, en dehors de ces cas particuliers qui devraient interpeller nos décideurs, les pharmaciens se retrouvent souvent en face d’un patient disposant d’une ordonnance dont ils ne peuvent pas vérifier l’authenticité. Ces prescriptions peuvent contenir des génériques dont ils n'en ont jamais entendu parler. Et sachant que la refonte du dahir de 1922 n’est pas pour demain, les pharmaciens attendent également de pouvoir accéder à un dossier numérique patient. Grâce à cet outil, ils pourront dispenser ces traitements sans avoir peur de se retrouver derrière les barreaux à cause d’une ordonnance falsifiée. Et ce qu’il ne faut pas perdre de vue, c’est que tant que ce problème ne sera pas réglé, la psychose qui règne continuera à priver les vrais malades de traitements auxquels ils ont droit ! 

Source : PharmaNews 692