Article N° 7618

MÉSUSAGE

Demande conseil à un «expérimenté» plutôt qu’à un médecin !

Abderrahim DERRAJI - 11 juin 2023 21:53

L’association Attadamoune, qui regroupe les employés du secteur pharmaceutique de la wilaya d’Agadir, a organisé, les 3 et 4 juin, leurs 18es Journées sur le thème «Bon usage du médicament : Responsabilité et sensibilisation».

Ces Journées, auxquelles ont participé des aides-pharmaciens en provenance de plusieurs villes du Royaume et d’autres professionnels de santé, ont constitué une occasion de choix pour pointer du doigt les dysfonctionnements qui sont à l’origine du mésusage des médicaments au Maroc.


Ces Journées ont également permis de mettre en avant le rôle pouvant être joué par une équipe officinale formée, informée et responsabilisée pour réduire les accidents liés à une utilisation inappropriée des médicaments, surtout depuis l’arrivée des réseaux sociaux.

En effet, des vidéos vantant les mérites de produits de santé, de régimes, et même de spécialités pharmaceutiques à prescription obligatoire inondent la Toile.


Malheureusement, un grand nombre de nos malades peut arrêter ou démarrer un traitement sur un simple conseil d’un ami, d’un voisin, voire d'un influenceur. D’ailleurs, l’adage populaire marocain : «Demande conseil à un “expérimenté” plutôt qu’à un médecin !» est toujours de mise, sans compter que nos patients n’hésitent pas à arrêter leurs traitements dès que les symptômes de leur maladie commencent à s’estomper.


Avec l’arrivée de l’été et des MRE (Marocains résidant à l’étranger), le mésusage va prendre une autre dimension ! En effet, ces derniers offrent généreusement et sans discernement d’importantes quantités de médicaments. Des fois, les pharmaciens et leurs aides évitent de justesse de graves accidents médicamenteux quand ils sont consultés à temps, mais bien souvent, les patients ne demandent conseil qu’après avoir utilisé des produits censés être prescrits par un médecin et administrés selon un protocole bien défini.


Le mésusage touche également des pays comme la France, pays où une étude menée par l’ANSM (Agence nationale de sécurité du médicament) auprès d’un panel de Français, a révélé que 3 Français sur 10 adaptent, par eux-mêmes, la dose ou la durée des médicaments qui leur ont été prescrits, qu’un Français sur 5 prend des doses plus fortes ou prend plusieurs médicaments en même temps pour soulager plus vite les symptômes, que près d’un Français sur 2 donne un médicament à un proche, car il a les mêmes symptômes, et c'est même 1 Français sur 10 qui le fait systématiquement ou souvent, et 34% considèrent comme plutôt pas risqué ou pas du tout risqué de prendre un médicament périmé.

Fortes des résultats de cette étude, les autorités sanitaires françaises ont lancé ce mois-ci une campagne d’information destinée au grand public et aux professionnels de santé pour favoriser le bon usage des médicaments.

Cette campagne exhorte les malades à respecter la prescription ou le conseil du professionnel de santé (dose, fréquence, durée, etc.), à utiliser uniquement des médicaments prescrits ou conseillés par un professionnel de santé, et non par un de ses proches, de ne pas prendre plusieurs médicaments en même temps sans l'avis d’un professionnel de santé et de faire attention aux modalités et à la durée de conservation des médicaments.


On ose espérer que des enquêtes similaires soient menées au Maroc pour évaluer l’ampleur du mésusage des médicaments et mettre en place une stratégie pour le contrecarrer, et pourquoi pas initier des campagnes médiatiques grand public d’envergure en impliquant les professionnels de santé.

Source : PharmaNEWS