Les organisateurs de la 19e édition du Salon Officine Expo qui s’est tenue du 3 au 5 mars 2022 à Marrakech, ont programmé, le vendredi après-midi, une table ronde qui a eu pour thème: «Dessinons ensemble la pharmacie d’officine dans le nouveau système de santé du Maroc».

Pour animer cette table ronde, le Comité scientifique a fait appel à cinq orateurs qui se sont tous accordés sur la nécessité de mettre à contribution le pharmacien d’officine pour renforcer la prévention et éviter une prise en charge tardive des maladies chroniques. Ces pathologies représentent un lourd fardeau pour le système de santé.

En effet et comme l’a rappelé le D^r Naoufel AL MALHOUF, directeur du conventionnement et de la normalisation au sein de l’Agence nationale de l’assurance maladie (ANAM), 3,3% de patients atteints de maladies chroniques utilisent, à eux seuls, 54,6% des ressources des caisses d’assurances maladies. Les quatre pathologies qui arrivent en tête des dépenses sont: l’insuffisance rénale chronique terminale, les tumeurs malignes, l’hypertension artérielle sévère et le diabète insulino-dépendant et diabète non insulino-dépendant.

Malheureusement, une grande proportion des malades chroniques n’est diagnostiquée que tardivement. À titre d’exemple, 40% des diabétiques et 22% des sujets affectés par le VIH s’ignorent et s'exposent à des complications qui pourraient être évitées si la prévention était de mise. Et comme l’a signalé le P^r Badre Eddine Lmimouni, l’apport des TROD (test rapide d'orientation diagnostique) et des autotests est indéniable pour renforcer le dépistage, le diagnostic et l’accès aux traitements. Ils jouent également un rôle important pour prévenir d’éventuelles transmissions de la maladie et pour réduire les risques de complications. Il ne faut cependant pas confondre les TROD avec les autotests qui sont destinés à être utilisés directement par le patient.

Le P^r Lmimouni a conclu sa présentation par un plaidoyer pour que le pharmacien d’officine puisse utiliser ces dispositifs comme c’est le cas dans de nombreux pays. Il a aussi insisté sur la nécessité de mettre en place tous les mécanismes garantissant une utilisation légale et une fiabilité optimale. 

 
En France, les TROD sont de plus en plus utilisés par les officinaux et c’est également le cas de plusieurs pays notamment en Europe. Et comme l’a rappelé le P^r Francis Megerlin dans sa présentation «Parcours des soins : évolution et adaptation du métier de pharmacien expériences françaises et Européennes», la France implique de le pharmacien dans le but d’optimiser la prise en charge des patients. Ce professionnel de santé s’est vu confier plusieurs services : entretiens pharmaceutiques pour patients sous AVK ( Anti-vitamine K), asthmatiques ou sous anticoagulants oraux d’action directe, bilan partagé de médications pour patients âgés polymédiqués, mise en œuvre de téléconsultation, vaccination antigrippale, mise en place des TROD pour dépister les angines, adaptation de la dispensation et accompagnement pour les patients sous anticancéreux oraux.
D’autres services sont prévus pour 2022 : prescription et injection de tous les vaccins à l’exception des vaccins à virus vivant atténué, dispensation à l’unité d’antibiotique, mise en œuvre du « pharmacien correspondant », entretien protocolisé de prévention du risque tératogène d’origine médicamenteuse chez la femme enceinte, délivrance de kits de dépistage du cancer colorectal aux patients éligibles puis orientation et réalisation de bandelettes urinaires en cas de suspicion de cystite.
La France a également mis en place la ROSP (rémunération sur objectif de santé publique). D’autres services vont voir le jour en 2023. Il s’agit de la prévention cardiovasculaire, du dépistage/prévention diabétique et de l’accompagnement sevrage tabagique.

Ces missions sont conditionnées par des prérequis, notamment la mise en place d’un espace dédié, d’une formation spécifique, d’un protocole d’assurance qualité, etc. Ces services génèrent également des revenus supplémentaires qui contribuent à stabiliser le modèle économique officinal, à favoriser l’interprofessionalité et à réaliser des économies pour les organismes payeurs.

La présentation du Pr Samir Ahid était en phase avec celle du Pr Francis Megerlin. Le Doyen de l'UM6SS a étayé ses propos en présentant des études qui ont révélé les avantages que le patient et le système de santé peuvent tirer de l’implication du pharmacien d’officine.

La présentation du Pr Raja Aghzadi qui a brossé un tableau du système de santé marocain et des défis à relever et les allocutions des autres orateurs n’ont laissé aucun doute sur la nécessité d’impliquer davantage le pharmacien et en faire un vrai partenaire dans le parcours de soins.

Pour conclure, et en utilisant un langage de pharmacien les maux sont identifiés et les remèdes connus. Charge aux officinaux de se mobiliser pour que ce dossier puisse être défendu comme ils se doit. Il y va de l’intérêt des patients et de la pérennité de la pharmacie et du système de santé. 

Source : PharmaNews