Article N° 2345
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Politique Pharmaceutique Nationale: la peur n'évite pas le danger...
Dr. Abderrahim Derraji - 27 janvier 2013 19:39Après la présentation du projet de la Politique Pharmaceutique Nationale (PPN) par le ministre de la santé El Houssaine Louardi à tous les membres de la Commission Consultative du Médicament et des Produits de Santé, le mercredi 23 janvier, à Rabat (lien), un trio formé du Dr. Abdelali Alaoui Belghiti (1), du Dr. Abdelmoumen Mahly (2) et du Dr. Abdelhakim Zalim (3), a pris part au congrès de la Fédération Nationale des Syndicats des Pharmaciens du Maroc qui s'est tenu vendredi et samedi dernier, à Casablanca. Leur présence a permis aux participants à cette rencontre d'être au fait de l'avancement du projet de la PPN.
Lors de la séance inaugurale, le Dr. Alaoui Belghiti, a axé son allocution sur la bonne ambiance qui a prévalu lors des dernières négociations qui ont réunis les cadres du ministère de la santé et les pharmaciens d'officine. Il a également rappelé l'approche participative prônée par le ministre de la santé qui a pesé de tout son poids pour que la PPN ne se fasse pas au détriment d'une des composantes du secteur, et particulièrement le pharmacien d'officine. Cette condition est nécessaire pour pérenniser les acquis de notre pays en matière de prise en charge des patients, comme il a été rappelé par le Dr. Moulay Taher Alaoui président du Conseil de National de l'Ordre des Médecins lors de la séance inaugurale.
Le Dr. Abdelmoumen Mahly a commencé sa présentation en rappelant les spécificités du monopole du pharmacien tel qu'il est défini par l'article 30 de la loi 17-04 (4). Ce monopole de compétence a été prévu par le législateur pour empêcher toute personne non qualifiée à s'adonner au commerce de médicament, et mettre ainsi en péril la santé des citoyens. Le Directeur du LNCM (5) n'a pas manqué de soulever le procès opposant actuellement les pharmaciens à la société casablancaise livrant illégalement les médicaments aux domiciles des malades. D'après le Dr. Mahly, des démarches seront bientôt entreprises par le ministre de la santé pour que les dispositions de la loi 17-04 soient respectées. Il a terminé sa présentation en énumérant les atteintes au monopole du pharmacien les plus courantes ainsi que la stratégie qui sera envisagée par le ministère de la santé pour les contrecarrer.
Le troisième intervenant du ministère de la santé, M. Abdelhakim Zalim, a quant-à-lui, et après avoir mis en exergue les limites de l'arrêté de fixation des prix des médicaments qui est en vigueur depuis 1969, a fait part aux pharmaciens du système de fixation des prix des médicaments retenu par l'administration après une large concertation avec tous les acteurs du secteur. Ce système fait appel à un benchmark avec sept pays de référence et à un décrochage plus approprié des prix des médicaments génériques.
Pour éviter que ces deux mesures n'affectent les revenus du pharmacien, l'administration et les instances professionnelles devront s'atteler, dans les semaines à venir, à mettre en place des mécanismes de compensation.
Selon le Dr. Mohamed Chattou, pharmacien et économiste, il faut agir sur deux leviers. Le premier est d'ordre réglementaire, il passe obligatoirement par le respect strict de la loi 17-04 et ses textes d'application et par la fin des dérogations accordées à la CNOPS lui permettant de continuer l'activité de sa pharmacie en dépit de l'article 44 de la loi 65-00 qui le lui interdit (6).
Quant-au deuxième levier que Dr. Chattou a qualifié d'économico-social, il devrait en principe aboutir à la mise en application d'une variante de la marge dégressive lissée. L'impact de la mise en place de celle-ci sur l'économie de l'officine sera étroitement corrélé aux tranches retenues, aux marges proposées pour chaque tranche et au volume de vente moyen réalisé sur chacune d'entre elles. Le dossier « Baisse des prix des médicaments » devient de ce fait purement technique nécessitant une étroite collaboration entre l'administration, les pharmaciens et des économistes chevronnés.
Les mécanismes de compensation actuellement à l'étude par l'administration et les organismes professionnels ne peuvent faire l'économie d'un système d'information très performant. Ce système devrait générer des indicateurs permettant de suivre de très prés l'incidence des baisses sur les revenus des pharmaciens. Le bon sens voudrait que ces baisses soient progressives et que leurs impacts soient régulièrement évalués.
Finalement, c'est au prix de tous ces efforts et de ces changements difficilement maîtrisables que le Maroc pourra se doter d'une vraie politique pharmaceutique sans mettre en péril la viabilité des pharmacies d'officine et le service de proximité exceptionnel qu'elles offrent à travers tout le royaume.Dr. Abderrahim Derraji
(1) Secrétaire Général du ministère de la santé(2) Directeur du laboratoire de contrôle du médicament(3) Chef de la Division de la Pharmacie (4) loi 17-04(5) Laboratoire National de Contrôle du Médicament(6)Article 44 : Il est interdit à un organisme gestionnaire d'un ou de plusieurs régimes d'assurance maladie obligatoire de base de cumuler la gestion de l'assurance maladie avec la gestion d'établissements assurant des prestations de diagnostic, de soins ou d'hospitalisation et/ou des établissements ayant pour objet la fourniture de médicaments, matériels, dispositifs et appareillages médicaux.
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Dr. Mahly Dr. Fassi Fihri Dr. Marzak Dr. Zalim et Dr. Sadiss
Source : Pharmanews 172