Article N° 5901

PRIX DU MÉDICAMENT

Décret de fixation des prix des médicaments : Quatre années de galère !

Abderrahim DERRAJI - 12 décembre 2017 04:03

Le décret 2-13-852 relatif aux conditions et aux modalités de fixation du prix public de vente des médicaments a été publié il y a juste quatre ans. Ce texte a instauré, pour la première fois, un benchmark avec 7 pays de référence pour définir le prix de vente des médicaments commercialisés au Maroc. Il a également prévu deux marges et deux forfaits applicables aux médicaments ainsi qu’un mode plus cohérent de décrochage des prix des médicaments génériques.

 


La publication de ce texte de loi et les réductions de prix qui en ont résulté ont fait l’objet d’un tapage médiatique sans précédent. Les baisses ont été présentées tel un trophée d’une guerre qui a démarré par la publication, au mois de novembre 2009, du rapport de la Mission d’information sur le prix du médicament au Maroc.

Nul ne peut contester, aujourd’hui, l’apport de ce décret, particulièrement en matière de transparence. Malheureusement, sa mise en application s’est accompagnée de certains effets collatéraux. L’application du benchmark s’est faite d’une manière sélective et le passage PPM-PPV* n’a pas été de tout repos pour l’ensemble des acteurs du secteur.

En ce qui concerne les conséquences de la baisse des prix, c’est surtout la prévisibilité qui en a reçu pour son grade, ce qui risque de compromettre, à court ou à moyen terme, la présence de certains opérateurs du secteur au Maroc. De leur côté, les génériqueurs essayent, comme ils peuvent, de tirer leur épingle du jeu, notamment en étoffant leur porte-feuille produits, ce qui n’est pas sans conséquence sur les pharmacies. L’évolution de la situation économique de ces dernières n’augure rien de bon. On a fait croire aux officinaux qu’ils allaient compenser la baisse de leur chiffre d’affaires par l’augmentation de la marge sur les produits à forte rotation et par un accroissement des volumes de ventes. En réalité, en dehors de quelques exceptions, la plupart des pharmaciens peinent à joindre les deux bouts.
 


La disponibilité de certains médicaments et particulièrement les spécialités pharmaceutiques onéreuses a été compromise depuis la mise en application du nouveau décret de fixation des prix des médicaments. Les marges forfaitaires que les pharmaciens perçoivent sur ce type de produits, et qui ne dépassent pas 400 DH, ne suffisent pas à couvrir les charges qu’ils induisent. En effet, sans un traitement fiscal spécifique de ces produits, le gonflement «artificiel» du chiffre d’affaires du pharmacien s’accompagne d’une augmentation de la cotisation minimale, de l’impôt sur le revenu, sans compter les déclarations de TVA que les pharmaciens doivent faire s’ils atteignent le chiffre d’affaires annuel de 2 millions de dirhams.

La mise en place de la Politique pharmaceutique nationale s’est également accompagnée d’une augmentation inimaginable du nombre de médicaments génériques dont le stockage chez les pharmaciens représente un coût qui ne cesse d’augmenter. Elle s’est également accompagnée du blocage des prix de certaines spécialités qui risquent de disparaitre définitivement du marché.

Lors des négociations qui avaient précédé l’adoption du décret 2-13-852, l’administration s’est engagée à définir la pharmacopée de référence pour que la dispensation des dispositifs médicaux stériles se fasse conformément à l’article premier de la loi 17-04. Apparemment, c’est une promesse de plus qui s’est perdue dans les méandres de l’administration.

Une fois de plus, les pharmaciens d’officine ont payé le prix fort. Et à voir comment les choses évoluent, ce ne sont pas les désillusions qui risquent de «tomber en rupture».

Source : PharmaNEWS 419