Article N° 5070

APPLICATIONS

Les Applis médicales : ces outils « d’auto-démesure » !

Aderrahim DERRAJI - 25 avril 2016 21:08

Les applications pour téléphone mobile, communément appelées applis, se multiplient d’une manière exponentielle. Les chiffres annoncés par les éditeurs de ces programmes dépassent l’entendement. Google Play propose à lui seul 1,6 millions (1) d’applications, suivi d’Appstore qui en propose 1,5 millions. Quant à Windows Store, il occupe la 3ème place avec ses 340000 applications. Ces outils rencontrent un grand succès chez les Mobinautes. En effet, depuis le lancement des premières applis, 80 milliards téléchargements d’applications ont été effectués, c’est dire l’intérêt que les Mobinautes portent à ces outils généralement utiles et faciles d’utilisation.
Les développeurs de ces programmes pour Smartphone s’intéressent à tous les domaines y compris le domaine médical, avec plus ou moins de réussite à l'image de l’application Instant Blood Pressure qui faisait partie des 50 premières applications IOS les plus téléchargées outre-Atlantique en 2015. Pour mesurer la fréquence cardiaque, ainsi que les pressions artérielles systolique et diastolique, les détenteurs de cette appli se contentent de poser leur index sur la lentille de la caméra et la base de leur téléphone sur la peau du côté gauche de la poitrine. Malheureusement, la facilité d’utilisation de cette application ne peut faire oublier son manque de fiabilité.
Les résultats farfelus obtenus par les utilisateurs de cette application ont poussé Timothy Plante et coll (2) à faire une étude chez 85 volontaires pour comparer les résultats obtenus par un tensiomètre électronique à brassard avec les résultats fournis par cette application.
Les résultats de cette évaluation, qui viennent d’être publiés sous forme d’une lettre adressée au JAMA, inquiètent les professionnels de santé. En effet, cette appli fournit des chiffres anormalement bas de la tension artérielle chez près de 80 % des personnes hypertendues. Les écarts observés peuvent atteindre 10 mmHg que ça soit pour la pression systolique ou pour pour la pression diastolique. Cette application a également tendance à donner des valeurs plus élevées quand le sujet a une tension « limite inférieure ».
Le succès commercial initial de cette application, qui n’est d’ailleurs plus disponible, a poussé d’autres éditeurs à mettre en ligne des applications qui reposent sur le même principe et qui continuent à être téléchargées par les adeptes du « self care ».

Tout en louant l’apport des applications et de l’implication des patients pour en faire des acteurs de leur santé, on ne peut tolérer les risques qui peuvent être encourus par les utilisateurs des applications médicales ou d’objets connectés. C’est, sans doute, ce qui a poussé la FDA (Food and Drug Administration) à s’atteler à la mise en place de mécanismes de régulation basés sur le contrôle de leur fiabilité.

Au Maroc, selon la dernière enquête menée par l’ANRT (3), le pourcentage de détenteurs de Smartphone avoisine les 63% en milieu urbain. 6,9% d’entre eux ont déjà téléchargé des applications médicales. À l’heure où nous mettons sous presse cet édito, il y a fort à parier que certains de nos concitoyens utilisent des applications ou des objets connectés peu fiables et risque d'être induits en erreur. J’espère, que nous n’allons pas attendre les premières victimes avant de commencer à nous pencher sérieusement sur cette problématique.
Abderrahim DERRAJI
Sources :
(1) Site Internet  ubg-interactive.com
(2) VIDALnewsofficine n° 411 - 21 avril 2016
(3) ANRT / Enquête de collecte des indicateurs TIC auprès des ménages et des individus pour l’année 2015 - Publication avril 2016

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Source : PMA