Les années passent, la pharmacie «trépasse»!
Comme le temps passe vite ! Les années se succèdent à une telle cadence qu’elles finissent par se confondre. La rentrée scolaire a eu lieu cette semaine. Si les enfants oscillent entre la mélancolie de la fin des vacances et l’excitation de retrouver les bancs de l’école, les parents, eux, ont tous la même obsession : comment faire face aux frais exorbitants des études de leur progéniture ? Car, en l’absence d’une école publique de qualité, les parents se sacrifient pour les études de leurs enfants. Seulement ce noble sacrifice ne s’arrête pas à leur niveau. Par un magique effet domino, il finit par impacter le pharmacien et en faire un sacrifié de plus.
C’en est ainsi au Maroc, la situation économique de la pharmacie d’officine est tellement précaire, qu’elle est tributaire de la rentrée scolaire, des fêtes, des vacances, du ramadan, du climat, etc. Tout est prétexte pour expliquer la baisse d’activité que connaît le secteur.
Pour trouver les solutions idoines à cette instabilité, il faudra à un moment ou à un autre, oser qualifier les choses par leurs noms. Ce que vit la pharmacie d’officine au Maroc -et dans d’autres pays d’ailleurs- est une véritable crise. Une crise, non seulement économique, mais une crise existentielle, en rapport avec la nature même de la profession.
Aujourd’hui, en plus de la lutte pour la protection de notre monopole, une réflexion profonde doit être menée par tous les intervenants du secteur. Elle doit répondre à deux grandes questions : Quelle pharmacie voulons-nous pour demain (en tant qu’espace de santé) ? Et quelles prestations doit fournir le pharmacien de demain? Car, il faut se rendre à l’évidence et admettre que la vente des médicaments comme seule source de revenu n’est plus suffisante pour la pérennité de la profession.
Bien avant nous, plusieurs pays se sont penchés sur cette question et ont fait évoluer la profession. En Suisse, rien que la semaine dernière, les pharmaciens ont été autorisés à effectuer la vaccination contre la grippe. En Belgique, la rémunération du pharmacien se compose de 3 piliers : une marge économique, un honoraire de base par délivrance et, éventuellement, un honoraire spécifique pour un soin pharmaceutique particulier. Au Canada, le pharmacien a le droit de renouveler certaines ordonnances et aussi de prescrire un médicament quand le diagnostic et le traitement sont connus.
Pour inverser la tendance actuelle, la pharmacie d’officine est acculée à faire sa «révolution». Pour cela, nous devons commencer par changer nos mentalités et nos actes au quotidien. C’est en étant plus constructifs, plus solidaires, exemplaires sur le plan de l’éthique et de la déontologie et respectueux les uns les autres que l’on pourra accéder à la respectabilité. Si chacun de nous décide d'attendre que les autres changent avant d’entamer sa propre mue, notre situation ne fera qu’empirer et notre « révolution » sera un cuisant échec. Car comme l’a si bien dit François René, vicomte de Chateaubriand : « Toute révolution qui n'est pas accomplie dans les moeurs et dans les idées échoue. »
Zitouni IMOUNACHEN
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