Article N° 8146

Étude publiée dans Journal of Affective Disorders

La clozapine : un traitement sous-estimé contre le suicide chez les jeunes ?

Abderrahim Derraji - 07 juillet 2025 23:03
Une étude menée en France entre 2014 et 2019 révèle un éventuel lien entre la prescription de clozapine et une baisse des taux de suicide chez les jeunes. Ce travail, fondé sur l’analyse de données nationales de santé (France), mettent en exergue non seulement les bénéfices possibles de ce traitement, mais également d’importantes inégalités d’accès aux traitements dans les différentes régions.
 
Les chercheurs ont exploité plusieurs bases de données, dont OPENMEDIC pour les prescriptions, CépiDC pour les causes de mortalité, et les données de l’INSEE (Institut national de la statistique et des études économiques) pour évaluer l’accessibilité aux médicaments dans 
différentes régions. Les chercheurs ont ciblé les moins de 19 ans pour les prescriptions, et jusqu’à 24 ans pour la mortalité, afin d’identifier des corrélations entre l’usage du lithium ou de la clozapine et les décès par suicide, troubles mentaux ou toutes causes confondues.
 
 
Les résultats sont frappants : les régions où la clozapine est davantage prescrite présentent des taux de mortalité par suicide plus faibles. En revanche, l'effet du lithium semble moins net. L’étude révèle aussi que la disponibilité de ces traitements est étroitement liée à la densité de psychiatres et au niveau socio-économique régional. Les zones les plus défavorisées, notamment en ressources humaines médicales, sont celles où l’accès à la clozapine et au lithium est le plus faible.
 
Ces résultats sont à prendre avec précaution, notamment en raison des limites de l’étude. Les analyses sont faites à l’échelle régionale, ce qui empêche d’établir des liens directs entre traitement et suicide au niveau individuel. De plus, les données ne tiennent pas compte des prescriptions en milieu hospitalier, ni des possibles effets d’une meilleure qualité globale des soins dans certaines régions.
 
Malgré cela, l’étude interpelle. La clozapine, bien qu’officiellement non autorisée avant 18 ans, est parfois utilisée hors indication pour des cas sévères de schizophrénie résistante chez l’adolescent. Ces prescriptions pourraient jouer un rôle protecteur contre le suicide, encore mal exploré dans cette tranche d’âge. En parallèle, les troubles bipolaires et schizophréniques restent souvent sous-diagnostiqués chez les jeunes, retardant l'accès aux traitements efficaces.
 
Cette étude souligne enfin un enjeu de santé publique majeur : même dans un système de santé universel comme celui de la France, des 
inégalités territoriales et sociales persistent dans l’accès aux soins psychiatriques pour les jeunes. Un constat alarmant qui appelle à 
renforcer l’équité dans la prise en charge des troubles mentaux les plus graves.

Source : PharmaNEWS