Article N° 7850

SANG CONTAMINÉ

Royaume-Uni : scandale du sang contaminé

Abderrahim DERRAJI - 14 juin 2024 16:43

Le Royaume-Uni est secoué par un scandale de sang contaminé, plus de trente ans après la France. Des dizaines de milliers de personnes ont contracté le VIH et l’hépatite C par transfusion sanguine. Le Premier ministre, Rishi Sunak, a présenté des excuses à la Chambre des communes pour les erreurs des gouvernements passés, qualifiant l’incident de «terrible injustice» et de «jour de honte» pour le pays. Un rapport de plus de 2.500 pages, basé sur une enquête publique de six ans, révèle l'ampleur de ce scandale.

 

Près de 30.000 Britanniques ont été contaminés par le VIH et l’hépatite C dans les années 1970 et 1980, dont environ 3.000 sont décédés. Les hémophiles, traités avec du facteur VIII fabriqué à partir de dons de sang, ont été particulièrement touchés. Beaucoup de ces dons provenaient des États-Unis, où le sang était collecté auprès de populations à risque comme les prisonniers et les toxicomanes, et les contrôles au Royaume-Uni étaient insuffisants.

 

Malgré les alertes dès 1984 sur les risques de transmission du VIH par transfusion sanguine, les autorités sanitaires ont continué à utiliser des lots de sang contaminé sans en informer les patients. Les gouvernements successifs ont tenté de dissimuler le scandale, allant jusqu’à détruire des documents compromettants. Selon le juge Brian Langstaff, qui a dirigé l’enquête, cette catastrophe n’était pas un accident, mais le résultat de négligences répétées des autorités.

 

L’aspect le plus choquant du rapport concerne les expérimentations sur des enfants hémophiles dans les années 1980, où des médecins ont administré du facteur VIII potentiellement contaminé sans le consentement des parents. Luke O’Shea-Philipps, contaminé par le VIH à l’âge de 3 ans, a témoigné qu’il a été traité comme un cobaye. Sur les 122 enfants hémophiles de l’école pour enfants handicapés d’Alton, 75 sont morts du Sida.

 

Le gouvernement britannique a déjà versé une compensation provisoire de 100.000 livres sterling (117.000 euros) à environ 4.000 survivants en 2022, mais les associations de victimes demandent des milliards de livres de dédommagement. Rishi Sunak a promis un programme d’indemnisation complète, affirmant que le gouvernement paierait le coût nécessaire pour cela.

 

Ce scandale rappelle celui du sang contaminé en France dans les années 1980 et 1990, où les autorités sanitaires avaient également minimisé les risques infectieux, conduisant à la contamination de milliers de patients, dont de nombreux hémophiles. En France, ce scandale a entraîné une série de procès et des réformes judiciaires, y compris la création de la Cour de justice de la République.

Source : UNIVADIS