Article N° 7773

RUPTURES DE STOCK

Ruptures de stock de médicaments : le revers de la mondialisation

Abderrahim Derraji - 25 février 2024 22:07
Depuis quelques années, les patients français ont dû faire face à des pénuries récurrentes de médicaments essentiels, une situation préoccupante aussi bien pour les professionnels de santé que pour les malades. Que ce soit l'amoxicilline, les traitements anticancéreux ou l'insuline, près de 5.000 médicaments ont été signalés en rupture ou risque de rupture en 2023 par l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM), un chiffre en constante augmentation par rapport aux années précédentes.
Face à cette situation préoccupante, le gouvernement français a dévoilé une nouvelle feuille de route pour la période 2024-2027, visant à lutter contre les pénuries de médicaments. Cette stratégie comprend plusieurs mesures clés telles que la surveillance renforcée des 450 médicaments essentiels, la relocalisation de la production de la matière première sur le territoire français et une meilleure information des patients.
 
Trois ministres sont à la tête de cette initiative : le ministre du Travail, de la santé et des solidarités, le ministre délégué chargé de l'Industrie et de l'énergie et le ministre délégué chargé de la Santé et de la prévention. L'objectif principal est de garantir la disponibilité des médicaments à long terme et de renforcer la souveraineté industrielle du pays.
La première étape consiste à surveiller de près les médicaments essentiels, en mettant à jour une liste annuelle des produits en tension. En parallèle, le gouvernement s'engage à relocaliser la production de certaines molécules sur le territoire français, une mesure qui devrait être concrétisée dans les mois à venir.
 
Une attention particulière est également portée sur l'information des patients et des médecins. Des campagnes de sensibilisation seront menées pour promouvoir une utilisation maîtrisée des médicaments, notamment des antibiotiques, afin de réduire le gaspillage. De plus, les médecins auront accès à des bases de données actualisées sur la disponibilité des médicaments.
Enfin, le gouvernement souhaite améliorer l'accessibilité des médicaments en encourageant les pharmacies à passer par des grossistes dans 80% des cas, simplifiant ainsi la gestion des stocks.
Malgré ces annonces, certains observateurs restent sceptiques quant à l'efficacité réelle de ces mesures. L'Observatoire Transparence Médicaments a notamment qualifié cette feuille de route de simple «effet d'annonce», soulignant le manque de changement concret dans la gestion des pénuries de médicaments.
 
La nouvelle feuille de route du gouvernement français contre les ruptures de stock de médicaments se veut ambitieuse, mais sa mise en œuvre effective risque d'être compliquée. Seule une évaluation de son impact réel sur la disponibilité des médicaments essentiels pour les Français nous permettra de savoir si les mesures adoptées ont été efficaces ou pas.
 
À l'instar des autres pays, le Maroc n'échappe pas aux tensions d'approvisionnement et aux ruptures de stock. L'entrée en vigueur de la Loi de Finances 2024, qui exonère de TVA tous les médicaments précédemment soumis à un taux de 7%, a exacerbé la situation. Ces perturbations, dues à l'exonération de la TVA, devraient probablement se dissiper d'ici l'été prochain. Néanmoins, il est indéniable que des efforts supplémentaires sont nécessaires pour réduire la dépendance à l'égard de l'étranger, notamment pour les médicaments essentiels. De plus, il est impératif d'informer de manière adéquate les professionnels de santé sur la disponibilité des médicaments, ainsi que de permettre aux pharmaciens de substituer les médicaments en rupture de stock ou en tension d'approvisionnement par leurs équivalents génériques.

Source : PharmaNews