Article N° 7498

Loi de Finances

Quand il n’en a plus, il y en a encore !

Abderrahim Derraji - 13 novembre 2022 22:57

Lors de la séance plénière législative tenue le jeudi dernier, la Chambre des représentants a adopté, à la majorité des voix, la première partie du Projet de loi de Finances 50-22 au titre de l’année budgétaire 2023. Quelque 183 députés ont voté pour la première partie du Projet de loi de Finances, tandis que 70 s’y sont opposés. La séance a également été marquée par la discussion des amendements présentés par le Gouvernement et les groupes de la majorité et de l'opposition. Le nombre d'amendements retenu a atteint 209.

La séance tenue vendredi dernier a été consacrée à la présentation des rapports des commissions permanentes sur les projets de budgets sectoriels. Cette séance a été consacrée à la discussion et au vote de la deuxième partie du Projet de loi de Finances, ainsi que de l'ensemble du Projet de loi de Finances 2023.

Cette loi de Finances prévoit, entre autres, d’harmoniser l’impôt sur les sociétés (IS). Toutes les entreprises devront payer 20% d’IS d’ici 2026. Il y a, cependant, deux exceptions. Il s’agit des sociétés déclarant un bénéfice net dépassant les 100 millions de dirhams qui se verront appliquer un taux de 35%, et les banques et compagnies d’assurances qui devront payer 40% d’IS.

Pendant que la loi de Finances était soumise au vote, la Confédération des syndicats des pharmaciens du Maroc a appelé tous les pharmaciens du Royaume à participer au sit-in qu’elle organisera le mardi prochain devant le Parlement. La Confédération estime que l’augmentation du taux de l’IS de 10 à 20% va aggraver les difficultés économiques que vivent les petites pharmacies ayant adopté le statut d’une SARL.

 


Photo Archives-pharmacie.ma
 

 

Même si tous les pharmaciens ne sont pas concernés par cette augmentation, cette disposition va s’ajouter à une série de mesures adoptées sans prendre en considération ni les spécificités de la pharmacie, ni sa situation économique.

En effet, depuis plus d’une décennie, les revenus des pharmaciens ne cessent de baisser, et particulièrement depuis l’entrée en vigueur du Décret 2-13-852 relatif aux conditions et aux modalités de fixation du prix public de vente des médicaments fabriqués localement ou importés. Ce texte a entraîné une baisse généralisée des prix des médicaments et la mise en place de deux forfaits insignifiants pour les produits dits onéreux.

Quant à l’augmentation du volume des ventes de médicaments annoncés par le ministre de la Santé de l’époque, ce n’était, ni plus ni moins, qu’un tour de passe-passe pour faire passer la pilule aux pharmaciens.

Les jeunes pharmaciens et ceux exerçant dans les zones rurales connaissent des difficultés insurmontables. Des centaines de ces officines sont en vente sans qu’elles trouvent d’acquéreur.

Quant aux pharmaciens plus âgés, ils ne sont guère mieux lotis. Aucune mesure n’a été prise pour les encourager à céder leurs pharmacies à des jeunes en quête de pharmacie rentable. Bien souvent, après avoir payé ses fournisseurs, ses crédits et les impôts, le pharmacien en âge de partir à la retraite se retrouve avec des miettes. Aucun abattement fiscal n'est prévu pour ce cas de figure.

La profession ne peut plus continuer sur cette voie. Les pharmaciens et leurs instances doivent réfléchir d’urgence à un nouveau mode de rémunération pour que les revenus du pharmacien soient moins impactés par les baisses de prix de médicaments. Ils doivent également se former pour améliorer leurs pratiques et prospecter de nouvelles missions génératrices de revenu, comme c’est le cas de nombreux pays voisins.

In fine, et pour que la profession puisse s'adapter aux changements et préserver un exercice au service du patient, il faut tout d'abord que les instances ordinales retrouvent un fonctionnement normal, à commencer par l’organisation des élections conformément aux lois en vigueur. Il faut, ensuite, que la tutelle soit plus réceptive aux doléances des pharmaciens qui se sentent de plus en plus marginalisés. Et pour finir, il faut que les pharmaciens se prennent en charge et mettent les bouchées doubles pour être à la hauteur des challenges qui se profilent à l'horizon.

Source : PharmaNews