Article N° 7476

SANTÉ MENTALE

Journée mondiale de la santé mentale : où en sommes-nous ?

Abderrahim Derraji - 17 octobre 2022 13:06

La Journée mondiale de la santé mentale, qui a été célébrée le 10 octobre, constitue une occasion afin d’exhorter toutes les nations à s’intéresser davantage aux maladies mentales dont la charge ne cesse de s’accroître en Afrique, principalement chez les enfants et les adolescents.

La première édition post-pandémie a été placée sous le thème «Faire de la santé mentale pour tous une priorité mondiale», sachant que l’isolement social, la peur de la maladie et de la mort, ainsi que les difficultés socioéconomiques associées à cette pandémie ont été à l’origine d’une augmentation d’environ 25% des troubles liés à la dépression et à l’anxiété à l’échelle mondiale.

D’après les chiffres de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), avant la pandémie, 116 millions d’Africains vivaient avec des troubles mentaux. Le taux de suicide est particulièrement préoccupant, tout comme l’augmentation exponentielle du taux de consommation et d’abus d’alcool chez les adolescents âgés d’à peine 13 ans.

Dre Matshidiso Moeti, directrice régionale de l’OMS, pointe du doigt le faible niveau du financement consacré à la santé mentale qui demeure un défi majeur qui sape les efforts consentis pour accroître les effectifs des agents de santé mentale en Afrique. À ce jour, on compte moins de deux agents de santé mentale pour 100.000 habitants, et l’essentiel de cet effectif est constitué de personnel infirmier spécialisé en psychiatrie et d’aides-soignants en santé mentale.

Pour relever ce défi, les États membres doivent impérativement honorer les engagements qu’ils ont pris en août 2022 au cours de la session du Comité régional de l’OMS pour l’Afrique, lorsqu’ils ont approuvé le Cadre pour renforcer la mise en œuvre du Plan d’action global pour la santé mentale 2013-2030 dans la région africaine de l’OMS. Ce document de référence met en lumière les graves pénuries observées sur le continent au niveau des services de santé mentale, et formule des recommandations concernant les mesures que les États membres doivent prendre pour y remédier.

Au Maroc, la situation est très inquiétante si on se fie à l’étude réalisée par le Conseil économique social et environnemental (CESE). Cette étude, qui a été publiée à l’occasion de la Journée mondiale de la santé mentale, a révélé que 48,9% de la population marocaine, âgée de 15 ans et plus, présentent ou ont déjà présenté des signes de troubles mentaux. Cette étude a également révélé une pénurie en ressources humaines et un faible nombre de lits dédiés aux maladies mentales.

En effet, le nombre de psychiatres exerçant au Maroc ne dépasse pas 454. Quant au nombre de lits, il est de 2.431. Le CESE explique cette situation par un «sous-investissement de l’État dans le domaine de la santé mentale».

Le CESE a formulé dans son apport une batterie de recommandations à commencer par l’élaboration de «politiques et programmes publics concertés de promotion de la santé mentale et de prévention des troubles mentaux et des risques psychosociaux adossés à des indicateurs chiffrés et mesurables et à des études d’impacts sanitaires et sociaux».

Le Conseil recommande également de revoir le projet de loi 71-13 relatif à la lutte contre les troubles mentaux et à la protection des droits des personnes atteintes de ces troubles avant son adoption définitive en impliquant les associations professionnelles et les syndicats des psychiatres, des psychologues, des infirmiers en psychiatrie, les associations d’usagers et la société civile».

Le Conseil préconise, par ailleurs, de renforcer les garanties juridiques et judiciaires des personnes atteintes de troubles mentaux, en vue de prendre en considération leur état de santé et de leur assurer une meilleure protection. Ceci ne peut être fait sans faire évoluer le Code pénal et le Code de procédure pénale en tenant mieux compte des spécificités de la maladie mentale et des besoins des patients concernés.

D’autres précieuses recommandations ont été émises par ce Conseil et dont le déploiement pourrait nécessiter beaucoup de temps.

On ose espérer qu’on célébrera la prochaine Journée mondiale de la santé mentale en concrétisant au moins quelques recommandations du CESE.

Source : PharmaNews