Article N° 7202

ÉLECTIONS ORDINALES

Conseils de l’Ordre : Les ministres s’en vont, nos présidents restent !

Abderrahim DERRAJI - 10 octobre 2021 21:38

Pour la deuxième fois, le ministère de la Santé sera confié à une femme, ce dont nous nous en réjouissons. Et si Yasmina Baddou, qui a été la première femme à occuper ce poste, avait une formation en droit, Nabila Rmili est docteur en médecine et a occupé de nombreux postes de responsabilité dans le secteur de la santé depuis qu’elle a quitté les bancs de la Faculté de médecine et de pharmacie de Casablanca en 2002.

Cette mère de deux enfants, qui est également Maire de la Wilaya de Casablanca depuis le 23 septembre 2021, va succéder à Khalid Aït Taleb qui a eu à faire face à une crise sanitaire inédite qui a été relativement bien gérée grâce à son département et à l’implication effective d’autres ministères et intervenants.

Durant la pandémie actuelle, le Royaume a été obligé de jouer des coudes pour pouvoir garantir la disponibilité des médicaments et d'autres produits de santé à commencer par les vaccins. La tension d’approvisionnement qui a touché certains produits a révélé au grand jour l’importance de l’autonomie en médicaments et produits de santé. Et comme l’a rappelé, à juste titre, le Souverain lors du discours qu’il a prononcé le vendredi 8 octobre 2021, à l’occasion de l’ouverture de l'année législative : «De fait, la crise pandémique a révélé le retour en force du thème de la Souveraineté. Qu’elle soit sanitaire, énergétique, industrielle, alimentaire ou autre, sa préservation est devenue l’enjeu d’une véritable compétition qui suscite des réactions fébriles chez certains.» SM le Roi a ajouté : «Aussi, afin de consolider la sécurité stratégique du pays, Nous appelons à la création d’un dispositif national intégré ayant pour objet la réserve stratégique de produits de première nécessité, notamment alimentaires, sanitaires et énergétiques et à la mise à jour continue des besoins nationaux en la matière».



Le marché marocain du médicament a connu des ruptures de stock essentiellement liées à la surconsommation de produits rentrant dans le cadre du protocole de prise en charge du Sars-CoV-2. Mais on ne peut pas nier, non plus, qu’il y a d’autres produits qui ont connu et qui connaissent des ruptures récurrentes. Et en dehors de quelques rares laboratoires qui prennent la peine d’informer les pharmaciens, dans la plupart des cas, ces derniers n’ont aucune visibilité au sujet de la disponibilité des médicaments en tension d’approvisionnement ou en rupture. Quant à l’administration, elle ne fait aucun effort pour que les professionnels de santé soient avisés à temps.

Il n’y a malheureusement pas que le problème des ruptures, les pharmaciens croulent sous des dysfonctionnements qui se sont accumulés au fil du temps. Les pharmaciens sont aujourd’hui au bout du rouleau et la rupture de dialogue avec le prédécesseur de Nabila Rmili n’a pas arrangé les choses. Durant deux ans, le ministre sortant avait donné l’impression d’ignorer totalement les pharmaciens sous prétexte que leurs Conseils de l’Ordre n’ont pas été renouvelés. Mais comment peut-on reprocher ce retard à toute une profession ! Les seules à blâmer sont la tutelle et sa passivité et la poignée de conseillers qui sont à l’origine du blocage des éléctions. Ce qui est paradoxal, c’est que notre pays déploie des efforts considérables pour que la démocratie et la transparence restent la règle.

Avec l’arrivée de la nouvelle ministre de la Santé, on a presque envie de «ressortir notre optimisme des tiroirs» et croire que cette fois-ci, on ne va pas avoir un ministre de la Santé qui va employer toute son énergie et tout son temps à gérer les urgences sans accorder d’importance aux maux qui gangrènent la profession, voire tout le secteur du médicament.

Les pharmaciens ont souvent été déçus par les ministres de la Santé, on ose espérer que, cette fois-ci, la nouvelle ministre remettra à l’ordre du jour la feuille de route élaborée par le ministre de la Santé Anas Doukkali et par le Pr Jamal Taoufik, ancien directeur du médicament et de la pharmacie.

Sans une volonté avérée, un plan d’action exhaustif et un échéancier clairement défini en commençant par les élections des conseils dont les présidents ont connu quatre ministres de la Santé, la pharmacie marocaine risque de vivre ses heures les plus sombres et priver le patient marocain d’un professionnel de santé accessible et d’un espace de santé qui lui rend de loyaux services.

Source : PHARMANEWS