Article N° 7164

ÉLECTIONS ORDINALES

Pharmacien d'officine : un souffre-douleur à portée de main !

Abderrahim DERRAJI - 30 août 2021 10:13

Il y a six ans, jour pour jour, les pharmaciens d’officine avaient organisé leurs dernières élections ordinales. Depuis cette date, ni les élections de mi-mandat, ni de fin de mandat, n’ont eu lieu.

Pourtant, des syndicats de pharmaciens ont adressé à la tutelle des courriers pour que les Conseils régionaux des pharmaciens d’officine se conforment aux textes qui les régissent. En parallèle, le ministre de la Santé a adressé une correspondance au président du Conseil national de l’Ordre des pharmaciens et aux présidents des Conseils régionaux pour qu’ils organisent leurs élections. Il les a même menacés, lors d’une réunion de la Commission sociale au Parlement, de procéder à la dissolution des conseils. Mais nos représentants semblent faire peu cas des déclarations de Khalid Aït Taleb ! Le respect de la loi et la démocratie qui était jadis de mise, s’est perdu dans les méandres de considérations que les pharmaciens de base ont de plus en plus de mal à cerner.

Les pharmaciens d’officine sont aujourd’hui totalement désespérés. Sans organismes professionnels fédérateurs, crédibles, responsables et engagés, leurs intérêts ne pourront être défendus. Résultat des courses : ils passent leur temps à compter les coups et ce ne sont pas les exemples qui manquent.

Le dernier exemple en date est le courrier adressé, le 26 août 2021, par la tutelle au président du Conseil national de l'Ordre lui demandant de rappeler aux pharmaciens l'importance de la disponibilité des médicaments entrant dans le cadre du protocole officiel de prise en charge de la Covid-19, notamment l’hydroxychloroquine (HCQ). Mais apparemment, le ministre semble oublier que tout le stock de ce médicament a été réquisitionné au début de la pandémie ce qui a, par ailleurs, posé pas mal de problèmes aux malades chroniques. Certes, entre temps, les officinaux ont été autorisés à dispenser à nouveau l’HCQ, seulement, pour qu’ils puissent le faire, il faut qu’ils puissent s’en approvisionner régulièrement.

L’exemple des tests salivaires mis sur le marché pour diagnostiquer le Sars-Cov-2 devrait également nous interpeller. La décision du ministre de la Santé n° 13201 du 23 août 2021 n'autorise pas les pharmaciens à réaliser des tests de Covid-19, ce qui n'est pas le cas de leurs confrères médecins qui pourraient se faire autoriser par les Autorités sanitaires régionales. Et étant donné que la loi 17-04,portant Code du médicament et de la pharmacie, autorise le pharmacien à dispenser les tests de diagnostic, tout a été fait pour que ces tests ne soient plus disponibles sur le marché. C’est bien dommage, car l’implication de 12 000 pharmaciens dans le dépistage de la Covid-19 et les prix bas et raisonnables qu’ils auraient pu pratiquer seraient des atouts de taille pour contenir la pandémie. La situation est devenue aujourd’hui kafkaïenne, car ces tests sont aujourd’hui vendus hors circuit légal par des particuliers via Internet et dans certaines boutiques!

En parallèle, le monopole du pharmacien est transgressé à longueur de journée. C’est sans doute ce qui a dû pousser l’administration à diffuser le 19 juillet 2021, la circulaire N° 977 DMP /D/18. Cet écrit, rappelle à tous les intervenants l’obligation du respect strict du circuit légal de distribution des médicaments et des produits de santé. Mais nous savons pertinemment que cette nième circulaire aura l’effet d’un pansement sur une jambe de bois! Au lieu de traquer, comme il se doit, les auteurs de pratiques illicites avérées, on se contente de diffuser régulièrement des circulaires pour se dédouaner et pour rappeler une loi que personne n’est censé ignorer. On note au passage, que quand le syndicat des biologistes a saisi l’administration pour que les pharmaciens ne fassent plus de tests salivaires, le ministère de la Santé a réagi au quart de tour en diligentant des inspections des pharmacies et des grossisteries avec une célérité pour le moins inhabituelle. C’est ce qu’on appelle: deux poids, deux mesures !

In fine, l’administration tient aujourd’hui l’avenir de la profession pharmaceutique entre les mains. Elle est la seule à pouvoir débloquer la situation actuelle, notamment en procédant à la dissolution des conseils s’ils s’obstinent à refuser d’organiser les élections. La profession a besoin d’urgence d’un Conseil de l’Ordre, un interlocuteur  légitime et crédible à même de la réguler et d’accompagner sa mise à niveau, deux conditions nécessaires pour garantir sa pérennité et préserver l’intérêt du patient !

Source : PHARMANEWS