Article N° 5350

EXERCICE ILLEGAL DE LA PHARMACIE

Le social oui, mais pas à n’importe quel prix !

Abderrahim DERRAJI - 04 octobre 2016 01:38

Le procureur du Roi de la ville d’El Jadida vient d’ordonner la perquisition du local d’une association de lutte contre le diabète ainsi que l’arrestation de son président.

D’après le journal «Le Matin» du 1er octobre 2016, cette arrestation fait suite au travail mené par la coordination des syndicats des pharmaciens du Maroc. Les membres de cette structure ont entamé leur action en dépêchant un huissier de justice qui a constaté la vente illégale de médicaments avec une remise de 25%.

Alertés, les agents de police d’El Jadida ont rapidement effectué une descente au siège de ladite association et ont pu constater, de visu, la nature et la quantité des médicaments que cette association détenait en stock. Ainsi, et toujours selon l’article publié par «Le Matin», la police a saisi plus de 800.000 DH de médicaments et de produits de santé, ce qui correspond à un stock moyen de plus de 5 pharmacies. Un grand nombre de familles thérapeutiques de médicaments fait partie des produits saisis, y compris des psychotropes, des insulines et des médicaments destinés aux différents hôpitaux et centres de santé du Royaume.

Le plus invraisemblable dans cette affaire, c’est que des boîtes de morphine en provenance d’Espagne ont également été saisies ! Or, faut-il le rappeler, les morphiniques sont des médicaments fortement réglementés au Maroc, d'autant plus que notre pays est signataire de la convention internationale sur la répression de la toxicomanie qui prévoit de lourdes sanctions pour tout trafic de stupéfiants.  

En plus de cette quantité de médicaments retrouvée dans les locaux de l’association, 2.000 autres boîtes de médicaments auraient été retrouvées au domicile du président arrêté par la police.
Cette affaire pose un certain nombre de questions. Tout d’abord, qui livre cette association en passant outre le circuit légal de distribution des médicaments ? Ensuite, est-ce que, sous couvert du social, nous devons sacrifier la sécurité de l’utilisation des médicaments ? Et enfin, devons-nous, à chaque fois, attendre qu'une plainte soit déposée pour réagir face à une situation grave qui exige des mesures urgentes ?

Malheureusement, notre vécu nous fait craindre que l’empathie et la clémence, qui sont souvent de mise sous nos cieux, permettent aux responsables de cette affaire et de leurs complices d’échapper aux sanctions prévues par l’article 135 de la loi 17-04, à savoir une peine d'emprisonnement de 3 mois à 5 ans et une amende de 5.000 à 50.000 dirhams.

Pour conclure, nous espérons que cette affaire va réveiller les esprits pour qu’on prenne enfin conscience de l’ampleur de la situation. L’exercice illégal de la pharmacie, sous toutes ses formes, y compris par certains professionnels de santé, doit immédiatement cesser. Non seulement pour respecter le monopole de compétence que le législateur a octroyé au pharmacien, mais surtout pour ne plus mettre en danger nos malades.


(1) « Les pharmaciens attaquent en justice une association pour vente illégale de médicaments » le matin – 30 septembre 2016 

Source : Pharmanews 359