LE "VIVRE ENSEMBLE" : A T-IL ENCORE DROIT DE CITÉ CHEZ LES PHARMACIENS?
Les pharmaciens, présents au Colloque National de la Pharmacie (CNP) qui s'est déroulé à Marrakech les 23 et 24 janvier 2015, ont suivi avec beaucoup d'intérêt un programme riche alliant formation et information. Le thème retenu pour cette année est : "Nécessité du rassemblement et de l'unification de la profession pharmaceutique par l'apaisement et la tolérance pour optimiser et dynamiser les actions de toutes nos instances". Cette thématique qui sonne comme un constat d'échec, vient nous rappeler que les différentes composantes de la profession continuent à s'entredéchirer compromettant ainsi le bon fonctionnement de nos instances professionnelles.
Comme par le passé, le syndicat des pharmaciens de Marrakech a mis les bouchées doubles pour offrir un cadre chaleureux à même de "catalyser" ce dégel que les pharmaciens de la base attendent tous.
Faut-il rappeler que l'organisation de la profession pharmaceutique a été jadis citée en exemple? Ni l'engagement politique, ni les considérations d'ordre matérielles, n’ont pu faire oublier aux représentants de l'époque les missions pour lesquelles ils s'étaient engagés. Le respect était de mise et les divergences ne se terminaient pas par les ruptures auxquelles nous sommes aujourd'hui habituées.
Ce qui est paradoxal, c'est que les pharmaciens appartenant aux différents courants pris séparément manifestent tous et sans exception, le souhait de voir la profession unie. Mais il suffit de creuser un peu ou d'analyser leurs faits et gestes pour se rendre compte, que peu d'entre eux sont réellement prêts à faire des concessions. La diabolisation des uns et des autres a fini par rendre le rapprochement quasi-impossible.
Pourtant, pour ceux qui ont envie de voir la bouteille à moitié pleine, le passage PPM-PPV n'a pas été, pour le moment, ce massacre qu'on nous a prédit. Le chiffre d'affaires moyen des pharmacies connaît une stagnation ou une baisse "infinitésimale, pour parler un langage de pharmacien. Quant au revenu du pharmacien, il pourrait connaître une stagnation, voire une légère augmentation.
Autre point positif, les conseils de l'ordre ont enfin été dissouts, ce qui va nous permettre d'élire nos représentants bien loin du vote par correspondance qui privait, jusque là, de nombreux pharmaciens aux compétences avérées de pouvoir briguer un mandat au sein des conseils régionaux.
Pour ceux qui voient la bouteille à moitié vide, ils craignent dans leur majorité que les promesses concernant la mise en place de garde-fous protégeant le monopole du pharmacien n'arrivent pas à bout des dérapages récurrents. Ils craignent aussi que le nivellement vers le bas des prix des médicaments ne soit pas compensé par l'augmentation de la consommation.
Un autre point qui inquiète particulièrement les pharmaciens, est la dérégulation qui affecte les horaires d'ouverture et de fermeture des pharmacies. Le climat d'impunité qui prévaut aujourd'hui, sera de lourde conséquence sur l'avenir des pharmaciens, à moins que les autorités locales, les responsables du ministère de la santé et les membres de la Commission Provisoire Spéciale n’assurent cette régulation en attendant les prochaines élections des conseils.
À la fin du CNP, les organisateurs ont fait part aux participants des sept recommandations retenues. Celles-ci pourraient, si elles sont mises en application, créer un climat confraternel propice aux échanges entre les différentes composantes de la profession.
Même si les pharmaciens se sont quittés sans avoir vu cette étincelle qui aurait pu enclencher le rapprochement, on ne peut que remercier les membres du bureau du Syndicat des pharmaciens de Marrakech pour leurs efforts et on espère que les autres syndicats continuent, eux aussi, à oeuvrer pour que les pharmaciens renouent avec le "vivre ensemble" en espérant qu'ils arriveront à faire de leur pluralité une vraie richesse et non un motif de divergence.
Abderrahim Derraji
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