Article N° 6562
PSYCHOTROPES
Salé : les psychotropes sous la loupe !
Abderrahim DERRAJI - 08 décembre 2019 20:15L’Amicale des pharmaciens du Maroc (APM) a organisé, jeudi dernier à Salé, une table ronde sur le thème «Cadre réglementaire de l’usage des médicaments psychotropes et stupéfiants au Maroc», thématique qui vient nous rappeler les difficultés que rencontrent les pharmaciens d’officine en délivrant cette famille de médicaments.
Pour animer cette table ronde, l’APM a fait appel au Dr Hassan Kisra, professeur en psychiatrie, à M. Mohamed Meiouet, docteur en pharmacie et en droit, au Dr Aderrahim Matraoui, pharmacien inspecteur, au Dr Anouar Benmhammed, président de l’Association «Les amis du patient», à M. Aziz Benbrahim, parlementaire, au Dr Mohamed Lahbabi, président de la Confédération des syndicats des pharmaciens du Maroc, et à M. Hassan Farhane, magistrat rattaché auprès du ministère public.
La composition de ce panel a permis de lever le voile sur tous les aspects de cette problématique.
Tout d’abord, les difficultés que rencontrent les patients pour se procurer leurs médicaments. Comme l’a rappelé le Pr Kisra, des médicaments essentiels ne sont pas accessibles en raison de leur prix ou par ce qu’ils ne sont pas disponibles sur le marché. Il a également évoqué le cas d’enfants vivants avec un TDAH (Troubles du déficit de l'attention avec ou sans hyperactivité) qui ne peuvent pas être traités du fait que le méthylphénidate n’est toujours pas commercialisé Maroc.
Ensuite, les pharmaciens, tout en étant sensibles aux difficultés que rencontrent leurs patients, sont devenus particulièrement méfiants vis-à-vis de toute prescription comportant des psychotropes ou des produits apparentés.
Et enfin et comme l’a rappelé Dr Mohamed Lahbabi, l’approche adoptée par les médias pour traiter les affaires liées aux psychotropes stigmatise les malades et donne une très mauvaise image des traitements qui, lorsqu’ils sont utilisés normalement, sont des médicaments comme les autres. L’appellation «karkoubi», qui est utilisée à tort et à travers, complique la situation.
Les différents conférenciers, qui ont pris part à cette table ronde, ont pointé du doigt l’obsolescence du cadre juridique qui régit les psychotropes. Ce cadre ne protège nullement le pharmacien qui peut à tout moment être assimilé à un trafiquant de drogue, y compris en dispensant dans les règles de l’art certains médicaments comme le Lyrica® et ses génériques. L’obsolescence du Dahir de 1922, la non-adoption de l’ordonnance infalsifiable comme c’est le cas dans de nombreux pays, la méconnaissance de la liste exacte des produits qui font l’objet de mésusage et les condamnations prononcées régulièrement à l’encontre des pharmaciens expliquent la méfiance des officinaux. Cette méfiance peut priver de vrais malades de leurs traitements. Les patients peuvent également avoir du mal à renouveler leurs ordonnances à cause de la saturation des services psychiatriques du secteur public.
Les différentes présentations ont été suivies d’un débat très intéressant qui traduit les inquiétudes des pharmaciens qui vivent sous la menace de se faire attaquer par les trafiquants de ces produits.
Les orateurs et les pharmaciens présents ont formulé une série de recommandations qui vont sans doute être utilisées par l’APM pour que des mesures concrètes puissent enfin voir le jour, car il y va de la santé des citoyens et de la sécurité des pharmaciens.
Source : PHARMANEWS