Article N° 5823

LÉVOTHYROX

Crise du Lévothyrox®: Les patients prennent le pouvoir

Abderrahim DERRAJI - 18 septembre 2017 13:06

Agnès Buzyn, ministre des Solidarités et de la Santé, invitée vendredi dernier à «La matinale de France Inter», a déclaré que l’ancienne formulation du Lévothyrox® serait à nouveau disponible dans une quinzaine de jours dans l’Hexagone. Cette mise à disposition «temporaire» permettra à de nombreux patients d’éviter les effets indésirables qui seraient engendrés par les excipients rentrant dans la composition du nouveau Lévothyrox®.


Sous la pression des associations de malades et des médias, l’administration a fini par faire marche arrière. Et ce n’est finalement pas plus mal d'autant que dans ce cas de figure, les malades ne disposent pas d’autres alternatives thérapeutiques.


Quant au laboratoire Merck Serono, il se retrouve entre le marteau et l’enclume. D’une part, il n’a fait que répondre à une doléance formulée par l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) dont la finalité est de développer une formule galénique avec une meilleure stabilité et, d'autre part, le nombre élevé de notifications le contraint à trouver une issue à cette crise.


Cet exemple qui fera date, est la preuve que nous sommes passés à une ère où les malades disposent désormais de moyens de faire valoir leurs désidératas. Le modèle de pharmacovigilance classique basé sur la déclaration spontanée d’évènements indésirables et une étude «à froid» de l'imputabilité, se trouve aujourd'hui bousculé par une approche où les patients peuvent grâce à des notifications, de bonne foi, mais pas forcément spontanées, et des pétitions remettre en question l'efficacité d’une spécialité donnée ou son innocuité.


Un autre médicament fait actuellement l’objet d’une action collective pour être retiré du marché français. Il s’agit du LARIAM®, un antipaludique auquel les usagers reprochent des effets secondaires, notamment des confusions mentales, des hallucinations surprises et des cauchemars à répétition.
Probablement, d’autres spécialités risquent de s’attirer les foudres des usagers des médicaments.


On ne peut nier que l’implication des patients pour suivre les effets indésirables soit un atout essentiel pour maîtriser l’iatrogénie des médicaments. Seulement, on risque, de plus en plus, d’être confronté à des situations où des actions collectives peuvent contraindre les décideurs politiques à prendre des décisions dans l’urgence, y compris quand l’imputabilité n’est pas avérée.

In fine, ces actions collectives légitimes qui peuvent éviter des catastrophes sanitaires peuvent également être à l’origine de décisions précipitées pouvant compromettre indirectement l’intérêt du patient !


N. B. Le Maroc n’est pas concerné puisque la formulation du LÉVOTHYROX® actuellement commercialisée est la même depuis 2003.

Source : PharmaNEWS 407