Article N° 3272
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Observation de l'anxiété pour la première fois chez un invertébré
Imounachen Zitouni, Docteur en pharmacie - 17 juin 2014 07:46Jusqu'à présent l'anxiété non pathologique n'avait été décrite que chez l'homme et quelques vertébrés. Des travaux publiés dans la revue Science du 13 juin 2014, ont révélé pour la première fois que l'anxiété a été observée chez un invertébré. Pour y parvenir, les chercheurs de l'Institut de neurosciences cognitives et intégratives d'Aquitaine (CNRS/université de Bordeaux) et de l'Institut des maladies neurodégénératives (CNRS/ université de Bordeaux) ont d'abord exposé les écrevisses à un champ électrique de façon répétée durant trente minutes. Ensuite, ils ont placé les écrevisses dans un labyrinthe aquatique en forme de croix. Deux des bras étaient éclairés, ce qui naturellement rebute les écrevisses, et deux étaient dans l'obscurité, ce qui, au contraire, les rassure.
Les écrevisses rendues anxieuses ont eu tendance à rester dans les parties sombres du labyrinthe, contrairement aux écrevisses témoin, qui ont exploré l'ensemble du labyrinthe. Ce comportement est une réponse adaptative au stress subi: l'animal cherche à minimiser les risques de rencontrer un agresseur. Cet état émotionnel s'est estompé au bout d'une heure environ.
L'anxiété des écrevisses est corrélée à un accroissement de la concentration de sérotonine dans leur cerveau. Ce neurotransmetteur est impliqué dans de nombreuses régulations physiologiques tant chez les invertébrés que chez l'homme. Elle est libérée dans des contextes de stress et régule plusieurs réponses liées à l'anxiété, comme l'augmentation des taux de glucose dans le sang. Les chercheurs ont aussi montré qu'en injectant une benzodiazépine, le comportement d'évitement de l'écrevisse est aboli. Ceci montre à quel point les mécanismes neuronaux permettant d'établir ou d'inhiber le comportement anxieux sont apparus tôt dans l'évolution et se sont bien conservés au cours du temps.
Ces travaux offrent aux chercheurs qui étudient le stress et l'anxiété, un modèle animal unique. Dotée d'un système nerveux simple dont les neurones sont faciles à enregistrer, l'écrevisse pourrait permettre de mieux comprendre les mécanismes neuronaux en ½uvre dans un contexte stressant, ainsi que le rôle de neurotransmetteurs tels que la sérotonine ou le GABA.
Source : http://www.techno-science.net