Article N° 3110
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Résistance aux antibiotiques, la facture de l’insouciance...
Abderrahim Derraji, Docteur en pharmacie - 12 mars 2014 20:06Depuis que le petit Issam a fait une appendicectomie à l'hôpital Ibn Sina, son état ne cesse de se dégrader. La fièvre et les douleurs ne le quittent plus. Les prélèvements effectués sur la plaie chirurgicale infectée ont révélé la présence d'une bactérie multirésistante (BMR).
En effet, l'antibiogramme effectué surle Staphylococcus aureus isolé chez cet enfant, a mis en évidence la capacité de ce germe à résister à tous les antibiotiques. Depuis, les chirurgiens sont particulièrement inquiets, d'autant plus que Issam n'est pas seul dans ce cas.
Le nombre d'actes chirurgicaux a été revu à la baisse par crainte de lacontamination d'autres malades par cette BMR. Les prouesses techniques accomplies quotidiennement par les chirurgiens tombent à l'eau faute de pouvoir soigner les éventuelles infections post-opératoires des malades.
Dépassés par l'ampleur du phénomène, les médecinsmultiplient les réunions avec de hauts responsables du ministère de la santé et des experts. Le constat est sans appel: tous les cocktails d'antibiotiques disponibles ne pourront arriver à bout de ce germe.
Au jour d'aujourd'hui, ce SARM* continue à semer la terreur dans les blocs opératoires et dans les salles d'examens. Seul espoir, un antibiotique qui vient d'être commercialisé au Japon et qui serait efficace contre ce germe qui sévit actuellement dans trois CHU du Royaume.
Si ce récit cauchemardesque, n'est en réalité qu'une fiction, les épidémiologistes n'excluent pas la survenue d'un tel scénario,surtout si rien n'est fait pour lutter contre ce phénomène de résistance aux antibiotiques.
Malheureusement, la majoritédes professionnels de santé, des usagers des médicaments et des décideurs de tous bords refusent de voir la réalité en face! En quelques décennies, notre utilisation non raisonnable de cette famille de médicaments précieux (Prescription et délivrance non justifiées et défaut d'observance en médecine humaine ainsi que l'utilisation systématique des antibiotiques chez les éleveurs) a largement contribué à la sélection de BMR. Ceci est d'autant plus inquiétant que le nombred'antibiotiques dans le pipeline des industriels se réduit comme une peau de chagrin. Les firmes pharmaceutiques préfèrent, de plus en plus, orienter leurs recherches et développements vers des molécules à rentabilité garantie, notamment celles destinées à la prise en charge des maladies chroniques.
Aujourd'hui, il est temps que ce phénomène inquiétant figure parmi nos priorités. Et sans une sensibilisation optimale et à grande échelle vantant la nécessité du moindre usageou au moins d'un usage rationnel des antibiotiques, les comportements irresponsables d'une minorité finiront par mettre en péril la santé de toute la société, voire de toute l'humanité.
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Source : infosante.ma