Article N° 3102

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L’ère des modifications génétiques peut commencer

Zitouni Imounachen, docteur en pharmacie - 10 mars 2014 10:02

Une technique mise au point l'an passé a permis à une équipe chinoise d'inactiver précisément deux gènes chez le macaque, et de produire une vingtaine de singes ayant ces deux modifications. «Avec cette nouvelle technique, souligne Guillaume Pavlovic, responsable d'équipe à l'Institut clinique de la souris (ICS) près de Strasbourg, le génome d'un primate a pour la première fois pu être modifié de manière contrôlée.»

Pour changer précisément l'ADN d'une cellule, les scientifiques ne disposaient jusqu'à présent que de méthodes très lourdes. Il était plus simple d'introduire un nouveau gène dans la cellule, qui s'insérait alors d'une façon plus ou moins aléatoire dans son génome. Ce procédé est utilisé pour la fabrication des plantes dites transgéniques qui hébergent un gène d'une autre espèce, ou pour la thérapie génique qui apporte un gène fonctionnel à la cellule à traiter.

Cette avancée repose sur une nouvelle enzyme bactérienne, appelée Cas9, dont le rôle a été mis à jour en 2007 par des chercheurs de l'industrie laitière. En 2012, une équipe internationale a montré dans la revue Science qu'elle pouvait être guidée pour couper une séquence d'ADN précise. Il suffisait de lui apporter un brin de matériel génétique complémentaire de la séquence d'ADN choisie. La fabrication de ce petit élément fait d'ARN étant à la portée de la plupart des laboratoires, ce type de technique devenait pour la première fois accessible.

Mieux, des modifications simultanées de l'ADN sont désormais possibles avec l'utilisation de plusieurs ARN guides à la fois. Dès lors, pour des maladies plus complexes, plusieurs anomalies génétiques pourront être corrigées dans des cellules souches ou reproduites chez l'animal pour les étudier. Plus généralement, l'efficacité du nouveau procédé permettra de produire des animaux ou des végétaux génétiquement modifiés beaucoup plus rapidement.

Cette technique explose aussi car les méthodes et programmes requis pour sa mise en ½uvre sont fournis gratuitement aux laboratoires intéressés par ses pionniers américains. C'est ce qui a permis aux chercheurs chinois de réaliser aussi rapidement leur première, annoncée dans la revue Cell du mois passé et qui utilise une approche déjà ancienne.

«Cette technologie est en train de révolutionner toutes nos pratiques à une allure que nous avons déjà du mal à suivre, constate Guillaume Pavlovic. Elle évolue vers toujours plus de sûreté et d'efficacité.» Après la décennie du séquençage, qui a permis d'accéder aux génomes des organismes et des cellules, l'ère de leur manipulation peut commencer

Source : http://sante.lefigaro.fr