Article N° 2975

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Prix du médicament: les pharmaciens tiendront-ils le coût?

Abderrahim Derraji, Docteur en pharmacie - 22 décembre 2013 18:34

Le Pr. EL Houssaine Louardi, ministre de la santé, a multiplié les déclarations annonçant sa satisfaction de voir le projet de décret relatif aux conditions et modalités de fixation des prix des médicaments (1) approuvé en Conseil de Gouvernement le vendredi 13 décembre. Cette pièce maîtresse de la politique pharmaceutique nationale, qui nourrit beaucoup d'espoir chez les usagers des médicaments, sonnera le glas des arrêtés de 1969 et de 1973 dont l'anachronisme est en grande partie responsable de certaines anomalies de prix des médicaments décriées dans plusieurs rapports.

Ce texte réglementaire pris pour l'application d'une disposition de la loi 17-04 (2) devrait en principe, apporter plus de transparence et de justesse dans le calcul des prix des médicaments. Il alignera les prix des spécialités pharmaceutiques déjà commercialisées au Maroc, sur la moyenne des prix pratiqués dans les 7 pays du benchmark. Il permettra également la mise en place d'un décrochage plus cohérent des prix des médicaments génériques.

La baisse du prix des médicaments qui découlera de la mise en application de ce décret, s'est petit à petit, imposée comme étant l'unique levier permettant d'améliorer l'accès aux médicaments. D'autant plus que le taux de pénétration de la couverture médicale a tendance à stagner, tandis que le pouvoir d'achat des citoyens se trouve englouti par la cherté de la vie. La crise économique et le contexte géopolitique de la région MENA expliquent, en partie, toute l'énergie déployée pour que ce dossier puisse être clos le plus rapidement possible.

Bien que nul ne peut remettre en question la nécessité d'avoir des prix plus justes, la plupart des opérateurs du secteur du médicament, y compris les pharmaciens, auraient été plus réceptifs à une mise en application progressive de ces baisses. Cela leur aurait permis de mieux s'adapter à l'impact de ces baisses sur leurs activités respectives.

Ce qui a également dérangé ces opérateurs dans le traitement de ce dossier sensé être technique, c'est son instrumentalisation et le populisme qui l'accompagne. Les sorties médiatiques plus ou moins maîtrisées et les communiqués qui fusent de toutes parts, ont été à l'origine de confusions qui nuisent à l'image de marque de tous les intervenants du secteur.

Aujourd'hui, les dés sont jetés. En dehors de certains représentants de pharmaciens qui donnent l'impression de maîtriser le dossier, un bon nombre de leurs confrères, échaudés par leur vulnérabilité économique, appréhendent, plus que jamais, l'entrée en vigueur de ces baisses. Et même si le ministre de la santé, s'est toujours montré sensible à la situation économique des pharmaciens, ces derniers attendent de pied ferme, les mesures compensatoires promises et dont la plupart ne constituent qu'un juste retour à la normale.

Pour conclure, en tant que professionnel desanté au fait des besoins cruciaux des malades, on ne peut qu'applaudir tout ce qui peut améliorer leur prise en charge. On espère seulement que la politique du médicament ne se focalise pas uniquement sur l'accessibilité économique en omettant au passage que l'accessibilité géographique, la qualité des produits de santé et l'efficience de l'offre en médicament n'ont pas de prix...Abderrahim Derraji, Docteur en pharmacie

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Source : Pharmanews 119