Article N° 2893

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L'imagerie moléculaire améliorée grâce aux UV

Zitouni Imounachen, docteur en pharmacie - 11 novembre 2013 18:45

Les techniques d'imagerie médicale sont devenues très performantes pour visualiser les organes ou leur fonction. Restait un défi: pouvoir observer ce qui se passe dans l'organisme à l'échelle moléculaire. Les résultats publiés par l'équipe de chercheurs suisses de l'École polytechnique de Lausanne (EPFL) dans la revue PNAS pourraient marquer un tournant important.

«L'imagerie moléculaire, ou métabolique, se résume actuellement en clinique à la médecine nucléaire, et notamment à la tomographie par émission de positons (TEP), très utilisée en cancérologie», relève Jean-Noël Hyacinthe, coauteur de l'étude. Cet examen, qui implique l'injection d'un produit contenant une forme radioactive de glucose, permet de repérer les tumeurs dont les cellules consomment plus de sucre que les cellules saines. Mais la TEP ne permet pas un très bon repérage anatomique et doit donc être le plus souvent couplée à un scanner à rayons X.

Une alternative de choix est l'imagerie par résonance magnétique (IRM), qui offre différents contrastes et une bonne résolution spatiale. Mais la détection des produits de contraste injectés pour obtenir des informations métaboliques reste problématique. «Avec un scanner IRM classique et à température ambiante, une molécule injectée sur un million est détectable, détaille Arnaud Comment, professeur à l'EPFL en charge du projet. C'est cette sensibilité basse que nous voulions améliorer.»

Une technique dite d'«hyperpolarisation» permet d'améliorer très nettement le nombre de molécules détectables. «Pour hyperpolariser un produit, il faut le placer à très basse température, proche du zéro absolu, dans un fort champ magnétique, puis ajouter des radicaux libres», explique Luc Darasse, directeur de recherche au Laboratoire d'imagerie par résonance magnétique médicale et multimodalités du CNRS. «Mais ces radicaux libres sont toxiques. La solution obtenue doit donc être filtrée avant d'être injectée au patient.» Or le signal émis par les molécules hyperpolarisées n'est visible que pendant une minute tout au plus. Chaque seconde est donc très précieuse.

La découverte des chercheurs de l'EPFL permet précisément de gagner du temps, puisqu'avec leur nouveau protocole plus besoin d'utiliser des radicaux libres. «Nous utilisons l'irradiation par UV pour hyperpolariser les molécules, raconte Arnaud Comment. Les radicaux produits naturellement lors de la réaction s'éliminent d'eux-mêmes lorsque le produit est réchauffé avant l'injection. Il n'y a plus besoin de filtrer.»

Pour cette étude, les scientifiques ont hyperpolarisé de l'acide pyruvique (ou pyruvate). Il s'agit d'un sucre produit dans notre organisme à partir de glucose qui circule dans le sang. Observer comment ce produit est capté et utilisé par les cellules apporte des informations cruciales. «Il est démontré que la transformation du pyruvate en lactate est augmentée dans les cellules tumorales des cancers de la prostate», rappelle Daniel Vigneron, professeur à l'Université de San Francisco. Le chercheur, qui mène un des premiers essais cliniques utilisant le pyruvate hyperpolarisé, salue le travail de ses collègues helvétiques comme une réelle avancée.

Source : http://sante.lefigaro.fr