Article N° 2819

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PHARMACIE VIRTUELLE OU LE RISQUE 2.0

Abderrahim Derraji, Docteur en pharmacie - 30 septembre 2013 07:24

Internet est devenu en moins de deux décennies un outil de recherche dont plus personne ne peut se passer. L'imagination des programmeurs et des fabricants de matériels électroniques ainsi que l'implication de gros opérateurs a transformé notre quotidien. Que l'on soit chercheur, étudiant, féru du web ou simple utilisateur, Internet est devenu un passage obligatoire. L'avènement des tablettes et des Smartphones et leur facilité d'utilisation, ont radicalement bouleversé les habitudes d'utilisation d'Internet. Aujourd'hui, un large pan de la population mondiale est connecté 24 heures sur 24.

De leur côté, les commerçants ont, petit à petit, apprivoisé ce nouvel outil pour en faire un allié de choix leur permettant de toucher des cibles qui étaient, il y a à peine quelques années, inaccessibles par les moyens de communication du commerce conventionnel.

Le e-commerce évolue d'une manière exponentielle. Sa croissance est soutenue malgré la crise économique qui sévit dans de nombreux pays. Tous les domaines sont touchés par la vente en ligne et la mondialisation qui s'apparentait à une vision d'esprit, est devenue, grâce à Internet, une réalité, voire une obligation. C'est notamment le cas des médicaments dont la vente en ligne inquiète particulièrement les professionnels de la santé. Les modèles anglo-saxons dont les pharmacies virtuelles sont gérées par des «pure players » comme c'est le cas en Grande-Bretagne, au Danemark et en Allemagne, cohabitent en Europe avec des sites Internet de vente de médicaments adossés à des pharmacies. Ce système qui existe déjà en Belgique, au Portugal et en France depuis le premier mars 2013 (1), offre davantage de sécurité. Un certain temps est cependant nécessaire pour que les organes régulateurs français puissent mettre en place tous les garde-fous nécessaires à la régulation de la vente en ligne des médicaments. Comme pour les sites certifiés HON, les sites autorisés à faire le commerce en ligne des médicaments pourraient être facilement identifiés grâce à une bannière qui peut être désactivée à distance par l'organisme régulateur quand le site ne répond plus aux critères requis.

Le conseil de l'ordre des pharmaciens Français (CNOP), résiste comme il peut pour éviter la dérégulation qui menace le circuit de distribution du médicament en général et les médicaments à prescription facultative (PMF) en particulier. Et comme la France n'a d'autres choix que de suivre à la lettre les directives européennes (2) en la matière, le CNOP continue son combat en faisant valoir les intérêts des patients, raison d'être de tout professionnel de la santé. La publication de la liste des sites Internet autorisés à la vente en ligne sur le site de cette instance et la sensibilisation des usagers des médicaments permettent dans un premier temps de barrer la route aux médicaments contrefaits qui foisonnent de plus en plus sur la toile.

In fine, pour que le médicament continue à sauver des vies sans en mettre d'autres en péril, nous devons veiller à la maîtrise de la traçabilité de ses circuits de distribution, comme nous devons continuer à lutter contre toute approche incompatible avec son bon usage. Tous ceux qui essayent à tour de bras de shunter ces circuits sécurisés pour pousser à la surconsommation, exposent l'humanité à un risque sanitaire certain.

Abderrahim Derraji, docteur en pharmacie

(1) lien

(2) Arrêt DocMorris du 11 décembre 2003Consulter Pharmanews 207: lien

Source : Pharmanews 207