PHARMANEWS
La lettre hebdomadaire de pharmacie.ma
N°677 06 mars 2023
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[ ÉDITORIAL ]
Production locale des médicaments en Afrique : De l’option à l’obligation !

Par Abderrahim Derraji, Docteur en pharmacie

Les participants à la 20e édition du Salon Officine Expo, qui s’est tenu les 24 et 25 février courant à Marrakech, ont pu suivre une table ronde très intéressante qui a été dédiée à l’harmonisation des enregistrements des produits de santé en Afrique, ainsi qu’à la présentation de l’Agence africaine du médicament (AMA).

En guise d’introduction, M. Karim Smine, modérateur de cette table ronde, a rappelé la volonté manifestée par les nations africaines pour faciliter l’accès aux médicaments et aux produits de santé. Cette volonté s’est concrétisée sur le terrain par la mise en place de l’AMA.

Selon cet expert en industrie pharmaceutique et en santé publique, cette Agence constitue un élément clé pour que les pays africains puissent atteindre la souveraineté en médicaments et en produits de santé. Cette souveraineté s’avère aujourd’hui inéluctable surtout depuis que la pandémie Covid-19 a révélé l’incapacité de certains pays africains à subvenir aux besoins de leurs populations en médicaments et en dispositifs médicaux.

M. Smine a également rappelé que le Maroc ne cesse de multiplier les initiatives afin de garantir un accès équitable aux soins à toutes ses populations. La couverture médicale généralisée et les réformes du système de santé constituent deux exemples concrets qui traduisent cette volonté. Par ailleurs, d’importants investissements ont permis au Maroc de se doter de nouveaux sites de production de médicaments. Ces sites permettront au Royaume de subvenir à ses besoins en médicaments. Une partie de la production de ces nouveaux sites pourrait être exportée vers les autres pays africains partenaires.

Après cette introduction, le Dr Michel Sidibé, envoyé spécial de l'Union africaine (UA) pour l'Agence africaine du médicament, a fait un exposé par lequel il a mis en exergue les insuffisances dont souffrent les pays africains en matière d’accès aux produits médicaux. Il a également présenté les grandes lignes de la stratégie adoptée par les pays africains pour garantir un accès équitable aux soins.

Cet ancien ministre de la Santé du Mali a également fait part à l’assistance de l’état d’avancement de la mise en place de l’AMA, une autorité continentale qui va contribuer, entre autres, à l’harmonisation de la réglementation pharmaceutique en Afrique.


Selon le Dr Michel Sidibé, les leaders politiques, les acteurs de l’industrie pharmaceutique, les chercheurs, les patients et les acteurs de la société civile s’accordent tous sur la nécessité de renforcer la production des produits médicaux en Afrique. La création de la Zone de libre-échange continentale africaine (Zlecaf) constitue également une réelle opportunité pour le Continent, sachant qu’il s’agit d’un marché de 1,3 milliard de personnes. Ce chiffre pourrait atteindre 2,5 milliards d’ici 2050.

Les volumes importants de médicaments qui seront échangés à travers la Zlecaf permettront une économie d’échelle et une réduction des coûts. Il en est de même pour l’harmonisation de la législation et la simplification des procédures, notamment douanières.

Pour le Dr Michel Sidibe, il est temps pour les pays africains d’opter pour un nouveau paradigme de leurs systèmes de santé, dont les vulnérabilités ont été mises à nu par les dernières pandémies.

Durant la pandémie Covid-19, le taux de couverture vaccinale en Afrique n’a pas dépassé les 15%. Cela s’explique par la dépendance des pays africains aux pays producteurs de vaccins.

Le nombre élevé d’intermédiaires est un facteur à prendre en considération. Ce nombre impacte le prix du médicament en Afrique. Paradoxalement, ce sont les pays africains les moins riches qui supportent les coûts de plus en plus élevés d’approvisionnement !

Aujourd’hui, il faut analyser tous ces facteurs et prendre les décisions qui s’imposent pour favoriser la production locale de médicaments et réduire la dépendance de l’Afrique vis-à-vis des pays producteurs de médicaments.

D’après Dr Michel Sidibé, la souveraineté est une exigence du moment et c’est le seul moyen qui nous permettra de réduire le gap et d’aboutir à des systèmes de santé équitables pérennes et efficaces.

Les nations africaines devraient investir dans le capital humain. L’expertise technique et l’innovation conditionnent le développement de la recherche clinique en Afrique.

La collaboration entre les grandes régions d’Afrique et les autres régions du monde, l’exploitation des datas et l’intelligence artificielle sont des domaines auxquels les nations africaines devraient s’intéresser. D’autres défis se profilent à l’horizon comme les droits intellectuels, le transfert de technologie et la digitalisation des hôpitaux.

Le développement d’une industrie locale reste également tributaire d’un environnement réglementaire adéquat qui ne peut être garanti en l’absence d’autorités sanitaires nationales fortes. 

Sans réglementation adéquate, la mise en place de la couverture médicale universelle sera compromise et on risque d’hypothéquer l’émergence de système de santé performant et résiliant.

L’harmonisation de la réglementation pharmaceutique en Afrique nécessite en plus des Agences nationales de médicaments, une harmonisation entre des cinq grandes régions d’Afrique. Il faut également adopter les procédures internationales comme les procédures opérationnelles normalisées (SOP).

Au niveau du Continent, l’AMA a été créée pour améliorer l’accès aux produits de santé de qualité et favoriser le déploiement de la couverture médicale sanitaire généralisée. Cette approche permettra de se prémunir contre les marchés parallèles de médicaments de qualité inférieure ou contrefaits.

Dans son intervention qu’elle a effectuée à distance, le Dr Margareth Ndomondo Sigonda, coordinatrice de l'Agence NEPAD, a rappelé que le projet d’AMA est devenu une réalité et c’est le Rwanda qui va abriter son siège. Dix commissions techniques ont été formées.

Les pays maghrébins sont malheureusement peu impliqués dans les structures actuelles de l’AMA. Ce sont plutôt les pays anglophones ayant un niveau de maturité 3 qui sont aux commandes. Il s’agit de la Tanzanie, le Ghana, le Nigeria et l’Égypte.

La banque mondiale, la banque africaine de développement, la Communauté européenne et d’autres structures sont disposées aujourd'hui à accompagner l’Afrique pour garantir l’émergence d’une industrie locale.

L’intervention du Dr Margareth Ndomondo Sigonda a été suivie par celle du directeur du médicament et de la pharmacie, Dr Aziz Lamrabti, qui a axé son intervention sur les efforts déployés par le Royaume afin de généraliser la couverture médicale. Il a également rappelé à l’assistance les réformes en cours qui ont permis la création de la Haute Autorité de la santé, l’Agence marocaine des médicaments et des produits de santé, les Groupements sanitaires territoriaux de la santé, et l’Agence du sang et des dérivés sanguins.

Il a aussi souligné les efforts consentis pour revaloriser les ressources humaines et garantir une digitalisation efficiente du système de santé.

Dr Aziz Lamrabti a conclu son allocution en indiquant que le Maroc s’engage à collaborer avec les autres autorités sanitaires du continent africain pour améliorer l’accès aux médicaments, aussi bien aux Marocains qu’aux autres pays africains.

La dernière présentation a été assurée par Dr Mohamed El Bouhmadi, président de la Fédération marocaine de l’industrie et de l’innovation pharmaceutiques (FMIIP).

Dr Mohamed El Bouhmadi a démarré son allocution l’extrait du Discours prononcé par le Souverain en 2014 à Abidjan : «L'Afrique doit faire confiance à l'Afrique. Dans le cadre d'une coopération décomplexée, nous pourrons, tous ensemble, construire le futur».

Après avoir énuméré des indicateurs du marché pharmaceutique marocain, le président de la FMIIP a rappelé que l’industrie pharmaceutique marocaine a une vision qui intègre les trois piliers définis par le nouveau modèle de développement : la souveraineté sanitaire, la généralisation de la couverture sociale et le «made in Morocco».

Dr El Bouhmadi a indiqué, par ailleurs, que la Coopération Sud-Sud est devenue une réalité. Le Maroc a scellé des partenariats avec les pays de la zone subsaharienne qui permettent à ces pays de s’approvisionner en médicaments qui sortent des chaînes de fabrication marocaines. Les laboratoires marocains ont également investi dans des sites de production de médicaments, notamment au Sénégal, au Rwanda et en Côte d’Ivoire.

Il a, cependant, rappelé que des freins d’ordre réglementaire, logistique et financier subsistent.

Cet expert a conclu sa présentation en exhortant tous les intervenants à redoubler d’efforts pour permettre d’arrimer le Maroc à l’Agence africaine du médicament. Il a également insisté sur l’importance de doter l’Afrique d’une plateforme de distribution de médicaments indépendante d’autres continents et de prévoir des aménagements au niveau de la loi pour permettre à l’industrie de distribuer en Afrique les produits même s’ils ne sont pas enregistrés au Maroc.

Cette conférence, qui a tenu toutes ses promesses, devrait interpeller tous les intervenants pour faire en sorte que l’industrie pharmaceutique marocaine puisse occuper la place qui lui sied au sein du continent africain.

Revue de presse
La Colombie-Britanique s’apprête à légaliser la vente de la cocaïne ! La Colombie-Britanique s’apprête à légaliser la vente de la cocaïne !

Deux sociétés canadiennes viennent de décrocher l’autorisation du gouvernement fédéral de produire et de vendre de la cocaïne.

Cette autorisation fait suite à l’entrée en vigueur, le 31 janvier dernier, d’une loi dépénalisant la possession et l’usage de certaines drogues dures.

Selon la ministre fédérale de la Santé, Carolyn Bennett, désormais et pour une durée de trois ans, un individu qui a en sa possession 2,5 grammes ou moins de certaines substances illicites pour son usage personnel ne sera plus arrêté, inculpé et le produit illicite ne sera plus saisi. Les agents de police qui constatent les faits fourniront aux personnes concernées des informations sur les services de santé et les services sociaux disponibles.

Les drogues dépénalisées sont : la cocaïne, la méthamphétamine, la MDMA (3,4-methylenedioxy-methamphetamine), l’héroïne, la morphine et le fentanyl, un opioïde extrêmement puissant très en vogue chez les toxicomanes canadiens et américains.

À Vancouver, les autorités ont choisi de lutter contre ce fléau en autorisant deux entreprises, Adastra Labs et Sunshine Earth Labs, à posséder, à produire, à vendre et à distribuer en toute légalité la feuille de coca et la cocaïne dans toute la Colombie-Britannique.

Cette province a suivi l’exemple du Portugal qui a dépénalisé la consommation des drogues dures depuis 2001 et l’État de l’Oregon qui a opté pour la même décision depuis 2020.

Par une telle mesure, la Colombie-Britanique a préféré adopter une stratégie résolument sanitaire et non punitive pour espérer limiter la consommation des drogues dures, sachant que depuis 2016, près de 11.000 habitants de cette province ont succombé suite à une overdose.

Cette décision ne fait cependant pas l'unanimité, le Premier ministre de la Colombie-Britannique, David Eby, s’est dit «étonné» par une telle décision. Il a également affirmé qu’il n’avait pas été consulté. «Cela ne fait pas partie de notre plan provincial», a indiqué ce dernier qui appréhende les conséquences de cette décision.

Par ailleurs, le ministre fédéral de la Santé a indiqué que les deux sociétés autorisées ne pourront pas vendre directement de la cocaïne aux toxicomanes. La distribution passe obligatoirement par les hôpitaux et les pharmacies agréées.
Source : JIM

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La pseudo éphédrine sur la sellette ! La pseudo éphédrine sur la sellette !

D’après un retour d’information sur le PRAC (Comité de pharmacovigilance de l’Agence européenne des médicaments – EMA) de février 2023 publié par l’ANSM (Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé – France) le 20 février 2023 et mis à jour le 28 février 2023, la réévaluation des spécialités contenant la pseudoéphedrine a révélé un petit nombre de cas de syndromes d'encéphalopathie réversible postérieure (PRES) et de syndromes de vasoconstriction cérébrale réversible (RCVS). Ces cas ont été identifiés dans les bases de données de pharmacovigilance et dans la littérature médicale.


L’ANSM rappelle que la pseudoéphédrine est un vasoconstricteur utilisé pour décongestionner le nez en cas de rhume. Elle se présente sous forme de comprimés, en association avec un antihistamine et antipyrétique 

(Paracétamol ou ibuprofène). Les médicaments contenant de la pseudoéphédrine présentent un risque connu d'événements ischémiques cardiovasculaires et cérébrovasculaires (effets secondaires liés à une ischémie au niveau du cœur ou du cerveau), comprenant notamment les accidents vasculaires cérébraux et les crises cardiaques. Des contre-indications et des avertissements sont déjà mentionnés sur les notices et le RCP (Résumé des caractéristiques produit) des produits concernés.


Fort de cette réévaluation, le PRAC envisage d'examiner les données disponibles et le rapport bénéfices/risques des médicaments concernés. Il décidera ensuite si leurs autorisations de mise sur le marché seront maintenues, modifiées, suspendues ou retirées. Cette décision sera appliquée dans toute l'Union européenne (UE).
Spécialités concernées en France :

  • Actifed rhume, comprimé.
  • Dolirhume paracétamol et pseudoéphédrine 500 mg/30 mg, comprimé.
  • Dolirhumepro paracétamol, pseudoéphédrine et doxylamine, comprimé.
  • Humex rhume, comprimé et gélule.
  • Nurofen rhume, comprimé pelliculé.
  • Rhinadvil rhume ibuprofène/pseudoéphédrine, comprimé enrobé.
  • Rhinadvilcaps rhume ibuprofène/pseudoéphédrine 200 mg/30 mg, capsule molle.
  • Actifed rhume jour et nuit, comprimé.
    Source : https://ansm.sante.fr

 

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ANSM : l’Ozempic doit être réservé au traitement du diabète de type 2 ANSM : l’Ozempic doit être réservé au traitement du diabète de type 2

Dans un point d’information mis en ligne le 1er mars 2023, l’ANSM (Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé – France) et la Caisse d'assurance maladie (CNAM) rappellent que «l’utilisation du médicament Ozempic (sémaglutide) doit être réservée au traitement du diabète de type 2 insuffisamment contrôlé. Une surveillance renforcée a été mise en place pour s’assurer que les prescriptions respectent ce cadre d’utilisation».
L’Ozempic (sémaglutide) est un médicament à prescription obligatoire indiqué dans la prise en charge du diabète de type 2 insuffisamment contrôlé.


D’après le point d’information diffusé par l’ANSM, des remontées de terrain font état d’une utilisation hors AMM de ce traitement pour perdre du poids.

L’ANSM et la CNAM ont tenu une réunion avec les représentants des associations de patients et les représentants des professionnels de santé pour échanger au sujet de ces détournements et de les informer des actions mises en œuvre.

L’ANSM et la CNAM ont également mis en œuvre une surveillance active de l’utilisation de cet antidiabétique à travers les données de vente et de remboursement issues du Système national des données de santé (SNDS) et des signalements d’usages non conformes et des déclarations d’effets indésirables aux Centres régionaux de pharmacovigilance.

Actuellement, les données de ventes suivies par l’ANSM augmentent de façon progressive depuis la commercialisation d’Ozempic en avril 2019, ce qui est cohérent avec la progression des ventes habituellement observée à la suite de l’arrivée sur le marché d'un nouveau médicament.

D’après les données du SNDS relatives à la période 1er octobre 2021-30 septembre 2022 l’utilisation hors AMM d'Pzempic ne dépasse pas 1%. 

L’ANSM a conclu son point d’information en rappelant aux professionnels de santé que :

- L'Ozempic doit être prescrit uniquement chez les sujets souffrant de diabète de type 2 insuffisamment contrôlé, conformément à son autorisation de mise sur le marché (AMM).

- Le détournement de ce médicament pour perdre du poids a un impact direct sur sa disponibilité pour les patients diabétiques et peut causer, ou accentuer, des tensions d’approvisionnement les privant de ce traitement essentiel.

- Ce médicament peut entraîner des effets indésirables, potentiellement graves, tels que des troubles gastro-intestinaux, des pancréatites ou des hypoglycémies.

Source : ANSM

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