PHARMANEWS
La lettre hebdomadaire de pharmacie.ma
N°675 20 février 2023
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[ ÉDITORIAL ]
Ces préparations lactées qui inquiètent !

Par Abderrahim Derraji, Docteur en pharmacie

Le groupe Lactalis vient d’être mis en examen plus de 5 ans après que des nourrissons aient contracté une salmonellose en consommant des laits infantiles produits par ce groupe.

En effet, selon Santé publique France, 36 nourrissons ayant consommé du lait Milumel ou Picot produit par la société Celia Laiterie dans son usine de Craon pour le compte du groupe Lactalis ont contracté cette entérobactérie.

L’enquête a abouti à une mise en examen de Lactalis et Celia Laiterie pour tromperie aggravée, blessures involontaires et inexécution de mesures de retrait et de rappel par un juge du pôle Santé publique du tribunal judiciaire de Paris, des infractions pour lesquelles elles encourent jusqu’à 1,5 million d’euros d’amende. Les deux entités ont également été contraintes par le juge d’instruction à consigner 300.000 euros chacune.

Les enquêtes menées à l’époque avaient soupçonné de nombreux manquements aux normes de sécurité et un manque de transparence de Lactalis.

Tandis que le groupe avançait que les contaminations étaient liées à des travaux entrepris début 2017 dans l’unité de Craon, il a pu être établi que le site était en réalité contaminé par des salmonelles depuis 2005. L’Institut Pasteur avait révélé qu’au moins 25 nourrissons avaient été contaminés par une salmonellose suite à la consommation du lait produit par cette unité entre 2005 et 2016.

On reproche également à Lactalis et Celia Laiterie d’autres manquements et leur mauvaise gestion du processus de retrait des lots potentiellement contaminés qui s’est étalé sur plusieurs mois.

D’après des journalistes de l’AFP (Agence France Presse), une expertise judiciaire versée au dossier en octobre dernier a conclu que la société Lactalis «a manqué de vigilance voire de clairvoyance vis-à-vis des signaux négatifs répétés qui alertaient sur une perte de sécurité de la fabrication», même si rien ne permet de dire pour l’instant que l’entreprise «aurait commercialisé avant le 1er décembre 2017 des produits en sachant qu’ils étaient contaminés par des salmonelles».

Il est à noter que l’affaire Lactalis a été à l’origine d’un renforcement, de la réglementation et des contrôles visant les industriels de l’agroalimentaire en France, notamment à travers la Loi Egalim 2 de 2021.

Ces manquements, qui devraient nous interpeller à plus d’un titre, viennent s’ajouter à une commercialisation de préparations pour nourrissons jugée abusive par des experts à travers des articles publiés dans la nouvelle série de la revue «The Lancet».

Selon ces publications, l’influence de l’industrie, notamment le lobbying contre les mesures vitales de soutien à l’allaitement maternel, met gravement en péril la santé et les droits des femmes et des enfants. Les mêmes écrits attirent également l’attention sur le pouvoir de l’industrie des préparations pour nourrissons d’influencer les décisions politiques nationales et d’entraver les processus réglementaires internationaux.

Par un article mis en ligne le 8 février 2023, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) rappelle les conclusions de ces experts et pointe du doigt à son tour les stratégies de commercialisation employées par l’industrie de la préparation pour nourrissons qu’elle qualifié à son tour d’abusives.

Le professeur Nigel Rollins, scientifique à l’OMS et auteur d’un article sur la commercialisation des préparations pour nourrissons, recommande des mesures qui doivent être prises dans différents domaines de la société pour mieux aider les mères à allaiter aussi longtemps qu’elles le souhaitent, parallèlement aux efforts visant à lutter une fois pour toutes contre la commercialisation abusive de préparations pour nourrissons.

Même si l’allaitement maternel présente des avantages considérables pour les jeunes enfants, à l’échelle mondiale, seule environ la moitié des nouveau-nés sont mis au sein dans l’heure qui suit leur naissance, tandis que moins de la moitié des nourrissons de moins de 6 mois sont exclusivement allaités au sein, conformément aux recommandations de l’OMS.

Les auteurs des articles publiés dans la revue britannique «The Lancet» incitent les États, entre autres, à mettre en place des mécanismes pour mettre fin aux stratégies de commercialisation abusives. Ils les invitent également à prendre des mesures plus larges sur les lieux de travail, dans les services de santé, au sein des pouvoirs publics et des communautés pour soutenir efficacement les femmes qui souhaitent allaiter, afin que cette démarche devienne une responsabilité sociétale collective.

Les publications insistent sur la nécessité de veiller à ce que les femmes bénéficient de la protection de la maternité adéquate prévue par la loi, notamment un congé de maternité rémunéré correspondant, au minimum, à la durée de six mois qui est recommandée par l’OMS concernant l’allaitement maternel exclusif.

Ces mesures de protection de la maternité devraient également être étendues aux millions de femmes qui travaillent dans le secteur informel et qui sont actuellement exclues de ces avantages.

Il est également primordial d’élargir la formation des agents de santé sur l’allaitement maternel afin qu’ils puissent fournir des conseils qualifiés aux parents avant et après la naissance.

Au Maroc, et en dépit de tous les efforts consentis pour promouvoir l’allaitement maternel, la mise au sein précoce dans la première heure qui suit l’accouchement n’est pratiquée que par 42% des femmes, et seulement 35% des bébés bénéficient de l’allaitement maternel exclusif durant leurs six premiers mois de vie.

On ose espérer que les efforts qui sont actuellement déployés au Maroc permettront d’atteindre les objectifs que le ministère de la Santé s’est fixés, à savoir atteindre, d’ici 2025, un taux de mise au sein précoce dans l’heure qui suit l’accouchement de 50%, et faire passer le taux d’allaitement maternel exclusif pendant les six premiers mois de vie de 35 à 50%.

Source : 
1 : JIM
2 : The Lancet : lien 

Revue de presse
Grippe saisonnière : un vaccin nasal pour les enfants en France Grippe saisonnière : un vaccin nasal pour les enfants en France

La Haute Autorité de santé (HAS – France) vient de préconiser la vaccination contre la grippe saisonnière pour les enfants âgés de plus de 2 ans.

La HAS a indiqué que les enfants constituent un réservoir de cette infection virale et qu’ils sont particulièrement touchés par celle-ci.

Par conséquent, cette vaccination devrait avoir un bénéfice aussi bien pour les enfants que pour la collectivité.

L’Autorité de santé préconise l’utilisation de vaccins injectables (FluarixTetra, VaxigripTetra, Influvac Tetra) ou du vaccin nasal Fluenz Tetra.

Cette recommandation devrait devenir effective lors de la prochaine campagne de vaccination, sous réserve d’une mise à jour du calendrier vaccinal.
Source : HAS

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Un traitement de l’épilepsie «neutralise» les symptômes de l’autisme Un traitement de l’épilepsie «neutralise» les symptômes de l’autisme

Une étude publiée mardi dernier dans la revue «Molecular Psychiatry», a révélé qu’un médicament peu coûteux utilisé dans la prise en charge de l’épilepsie peut annuler ou arrêter les symptômes de l'autisme chez la souris.

En effet, une équipe d'experts de l'Institut Hector pour la recherche translationnelle sur le cerveau (HITBR), en Allemagne, a découvert que la lamotrigine est capable de réduire les problèmes comportementaux et sociaux liés à ce trouble. Les résultats obtenus par cette équipe de chercheurs sont présentés comme étant les plus proches d'un traitement potentiel pour les humains.

Moritz Mall, biologiste cellulaire et chercheur principal de ces travaux, a indiqué dans un communiqué qu’un traitement médicamenteux à l'âge adulte peut atténuer le dysfonctionnement des cellules cérébrales et contrer les anomalies comportementales typiques de l'autisme.

Après plusieurs années, les chercheurs ont identifié la protéine MYT1L comme jouant un rôle dans diverses maladies neuronales.

Pour mettre en évidence l'impact de cette protéine sur les symptômes de l'autisme, l’équipe de chercheurs a génétiquement désactivé la protéine MYT1L chez des souris et dans des cellules nerveuses humaines. Suite à cette désactivation, ils ont remarqué que cela entraînait une hyperactivation électrophysiologique dans les neurones de la souris et de l'humain ce qui altère la fonction nerveuse.

Selon le même communiqué, le recours à la lamotrigine permet de normaliser l’activité électrophysiologique des cellules en question. Chez les souris, le traitement a même permis de freiner les comportements associés aux TSA (trouble du spectre de l'autisme), comme l'hyperactivité. 

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France : La sanction record prononcée contre Novartis et Roche annulée en appel France : La sanction record prononcée contre Novartis et Roche annulée en appel

La justice française vient d’annuler en appel la sanction de 450 millions d'euros infligée en 2020 par l'Autorité de la concurrence aux laboratoires Novartis et Roche.

Les deux laboratoires suisses ont été sanctionnés pour des «pratiques abusives» ayant pour objectif de préserver les ventes de Lucentis, un traitement utilisé dans la prise en charge de la DMLA (Dégénérescence maculaire liée à l’âge), principale cause de malvoyance chez les plus de cinquante ans dans les pays industrialisés.

Or, les ophtalmologues ont constaté que l’anticancéreux Avastim avait des effets positifs sur la DMLA. Ils s'étaient alors mis à le prescrire hors AMM (autorisation de mise sur le marché) d’autant plus que ce traitement commercialisé par Roche hors des États-Unis coûte 30 fois moins cher que Lucentis qui est commercialisé par Genentech.


Pour l'Autorité de la concurrence, les trois laboratoires s'étaient entendus pour dénigrer l'usage de l'Avastin en ophtalmologie, aussi bien auprès des professionnels de santé que des pouvoirs publics.


La Cour d'appel de Paris a estimé qu'à compter de 2011 et l'entrée en vigueur d'une nouvelle législation, l'Avastin devait être considéré comme hors marché pour le traitement de la DMLA, à partir du moment où il n'avait pas d’AMM pour la prise en charge de la DMLA.
La justice en a déduit «qu'aucun comportement d'éviction» ne pouvait être reproché sur une période où l'Avastin et le Lucentis «ne pouvaient se faire valablement concurrence».

La Cour d’appel a également considéré que la communication du groupe Novartis durant la période retenue, avait été «mesurée dans son ton» et n'avait pas été dénigrante, et que celle des groupes Novartis et Roche «n'avait pas été alarmiste, voire trompeuse».
Elle a, pour finir, estimé que le comportement de «blocage par Roche», qui avait refusé de mettre à la disposition des autorités de santé des échantillons d'Avastin pour entamer une étude scientifique, n'avait pas pu avoir d'effet anticoncurrentiel.

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