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Colloque de Marrakech : les pharmaciens plus inquiets que jamais …

Le Syndicat des Pharmaciens de Marrakech a organisé le week-end dernier  l’édition 2013 de son colloque annuel. Les organisateurs de cette rencontre ont, comme à l’accoutumée, mis les bouchées doubles pour permettre à leurs convives de se retrouver dans un cadre confraternel et propice pour débattre des différents sujets d’actualités de la profession.

Comme l’année dernière, cette rencontre a commencé par une cérémonie d’hommages. Les organisateurs ont choisi cette année trois pharmaciens qui se sont distingués chacun dans un secteur. Tout d’abord,  Dr. Fatima zohra  Al Mokhtari, pharmacienne d’officine connue pour son abnégation et son penchant pour le travail associatif. Ensuite, le Pr. Moha Jana, un enseignant et chercheur de renommée qui a formé des générations de pharmaciens. Et Pour finir, le Dr. Abdelilah  Lahlou, DG du Laboratoire Iberma, un pharmacien engagé avec une fibre citoyenne peu commune. 

Cette séance d’hommage a laissé place à la séance inaugurale. Les présidents des différents organismes professionnels se sont relayés au podium pour informer les congressistes au sujet de l’avancement du dossier « Prix du médicament ». Le président de séance, Dr. Mohamed Belghazi, connu pour son franc-parler, a rappelé à l’assistance la genèse et la situation chaotique que vit le pharmacien d’officine aujourd’hui. Selon lui, cette situation est le fruit d’une succession de mesures telles que l’annulation de la convention fiscale ou la mise en place de la TVA pour les pharmacies réalisant un chiffre d’affaires dépassant 2 millions de Dirhams. De telles mesures ont entraîné une baisse des revenus des pharmaciens qui a atteint 50% dans certains cas. Le nombre élevé des créations de pharmacie, la mise en place du Ramed et la baisse qui va toucher plus de 1000 spécialités pharmaceutiques risquent d’assener le coup de grâce à la moitié des pharmaciens.

Le président du Conseil Régional des Pharmaciens d’Officine du Nord, Dr. Mustapha Sadiss, a fait part aux pharmaciens de la position des instances professionnelles vis à vis de la baisse qui affectera les prix des médicaments. D’après, Dr. Sadiss, la réceptivité du ministre de la santé, la collaboration entre les différentes composantes de la profession et une stratégie claire sont des atouts de taille pour préserver les intérêts des pharmaciens d’officine.

Le Dr. Salah Eddine Moktarid, secrétaire général du Conseil de l’ordre des pharmaciens d’officine du Sud a, quant-à-lui, exhorter les pharmaciens à surveiller de près les atteintes de leur monopole,  à l’image de ce qui a été fait par plusieurs syndicats à travers le royaume. Il a également incité les pharmaciens  à étudier le projet relatif à la  Politique Pharmaceutique National et de faire parvenir leurs propositions aux instances professionnelles.

Dr. Abdelhakim Zalim, Chef de la Division de la Pharmacie au Ministère de la Santé, a présenté l’approche prônée par le ministre de la santé qui fait de l’amélioration de l’accès aux médicaments une priorité. Cette amélioration, tributaire de la baisse des prix des médicaments, ne devrait pas se faire au détriment du pharmacien. Les représentants de l’administration et les responsables des instances professionnelles doivent faire des études d’impact de la baisse du prix des médicaments sur le chiffre d’affaires des pharmacies.  Selon M. Zalim ces baisses ne devraient rentrer en vigueur qu’après la signature d’un accord entre les représentants des pharmaciens et  leur ministre de tutelle.

Un long débat a suivi cette présentation qui a mis en exergue les craintes des pharmaciens et leur incompréhension vis à vis de la gestion de l’affaire opposant les pharmaciens à la société de livraison des médicaments à  domicile. Plusieurs pharmaciens ont également évoqué la nécessité de prévoir des mesures fiscales appropriées pour préserver leurs revenus comme l’ancienne convention fiscale. De telles mesures s’imposent d’autant plus que le mode de rémunération restera étroitement lié aux marges perçues par le pharmacien sur les chiffres réalisés pour chaque tranche de prix de médicament.

La journée du samedi a été en grande partie dédiée aux sujets d’actualités de la profession. M. Abdelilah Lahlou et après avoir rappelé le rôle essentiel que joue le pharmacien d’officine en tant qu’acteur de la santé, a fait un plaidoyer pour la mise en place d’une confédération regroupant tous les acteurs du secteur dans le but d’élaborer une vision globale et concertée.

La plupart des tables rondes ont été très suivies par les pharmaciens, notamment la conférence qui a eu pour thème : «  Etat actuel du monopole des médicaments, quelle perspective ? »  Cette table ronde a été conjointement animée par Dr. Laghdaf Rhaouti Mohamed, past président du Conseil National de l’Ordre des Pharmaciens et Dr. Abderrahim Chaouki, Vice président du syndicat des pharmaciens de Mohammedia. Les deux présentations ont permis aux pharmaciens de mieux cerner les textes réglementant le monopole du pharmacien même si en pratique ce dernier ne cesse d’être empiété par de plus en plus d’intervenants.  Cette table ronde a été suivie par une conférence animée par Dr. Mohamed Chattou au sujet des mesures d’accompagnement qui devraient être mises en place avant l’entrée en vigueur du nouveau décret réglementant la fixation des prix des médicaments.

La dernière conférence a été dédiée aux addictions.  Le Dr. Jalil Bennani qui vient de publier son dernier ouvrage « Un psy dans la cité », a fait une présentation de bonne facture qui a été suivie d’un débat très passionnant.

Enfin, une fois de plus les membres du bureau du SPM ont organisé un colloque de qualité qui a permis à toutes les composantes de la profession de contribuer à l’élaboration de recommandations pour mettre fin à la dérégulation qui affecte de plus en plus le secteur pharmaceutique.
Abdearrhim Derraji - 6 février 2013