RÉFLEXION SUR LES EFFETS INDÉSIRABLES DES MÉDICAMENTS
PR. R-Benkirane & PR. R- Soulaymani
Les médicaments ont indéniablement joué un rôle majeur dans la prolongation de la durée de vie et l’amélioration de sa qualité.
Force à nous de constater que le médicament peut être responsable d’effets indésirables. Le « risque zéro » n’existe pas : le médicament est une substance active qui va interagir avec des fonctions physiologiques, des récepteurs ou des systèmes effecteurs de l’organisme aboutissant à l’effet thérapeutique. Parallèlement à cet effet thérapeutique recherché le médicament est susceptible de provoquer des effets indésirables.
Plusieurs études internationales ont souligné les conséquences délétères des effets indésirables médicamenteux, que ce soit en terme de morbidité et mortalité, d’hospitalisation ou encore de coûts médicaux.
Aux USA, les effets indésirables des médicaments représentent la 6éme voire la 4 éme cause de décès (1).
Le pourcentage des hospitalisations secondaires aux effets indésirables des médicaments atteint dans certains pays plus de 10%
Norvège........11.5%
France..........13.0%
UK................16.0%
Les frais d’hospitalisation inhérents à la prise en charge de patients présentant un effet indésirable médicamenteux engagent un surcoût de dépenses et représentent plus de 15-20% du budget hospitalier (1).
Ces effets indésirables sont d’autant mieux perçus par le prescripteur et acceptés par le patient qu’ils figurent sur les mentions légales du médicament. Une réflexion du clinicien sur la problématique suscitée par les effets indésirables s’impose depuis l’étape de leur détection jusqu’à celle de leur prise en charge.
DÉFINITION D’UN EFFET INDÉSIRABLE MÉDICAMENTEUX
L’OMS a défini en 1972, l’effet indésirable médicamenteux comme étant une réaction nocive et non voulue, se produisant aux posologies normalement utilisées chez l’homme pour la prophylaxie , le diagnostic ou le traitement d’une maladie ou la modification d’une fonction physiologique.
La mondialisation, le consumérisme, l’explosion du libre-échange ainsi que la disponibilité de l’information sur Internet ont contribué ces dernières années à modifier l’accès du grand public aux médicaments.
Dans un souci d’adaptation à cette évolution observée dans les sociétés, la pharmacovigilance a dû élargir son champ d’application.
C’est ainsi que la nouvelle définition de l’EIM inclut également toute réaction résultant d’un mésusage de produit de santé, constituant un syndrome de sevrage lors de l’arrêt du produit ou d’un syndrome de dépendance, découlant d’un usage abusif ou de la mauvaise qualité du produit (OMS ,2000) (2).
La pharmacovigilance s’intéresse à tous les produits de santé, qui incluent les médicaments, les vaccins et les produits contraceptifs, les produits biologiques et de biotechnologie, les produits de diagnostic biologique et radiologique, les produits diététiques et additifs alimentaires, les plantes et produits de la pharmacopée traditionnelle, les produits homéopathiques, les cosmétiques ainsi que les produits vétérinaires.
DÉTECTION DES EFFETS INDÉSIRABLES MÉDICAMENTEUX:
L’évaluation des effets indésirables des médicaments s’opère avant et après leur commercialisation. Malgré toute la rigueur qui entoure les essais cliniques, les prévisions des EIM recueillies avant l’Autorisation de mise sur le marché (AMM) restent incomplètes. D’où la nécessité de mettre en place un dispositif en post AMM, chargé de collecter, valider les EIM et de prendre les mesures pour y faire face.
Avant commercialisation :
Au cours des Essais pré cliniques, La détection des effets indésirables reste insuffisante :
Le nombre d’animaux testés est limité ainsi que la durée d’observation. Sachant que la majorité des effets indésirables résultent de l’action des métabolites. La différence de pharmacocinétique et de biotransformation du médicament est souvent difficilement extrapolable de l’animal à l’Homme. Certains effets indésirables ne seront pas détectés (troubles psychiques, allergie…).
Au cours des Essais cliniques, La prévision des effets indésirables reste limitée :
- car les effets indésirables graves ont une faible fréquence d’apparition .A titre d’exemple, on observe 1 choc anaphylactique pour 47500 injections de Pénicilline (RAA) ; 0.08 cas de Syndrome de Reye pour 100 000 enfants recevant l’Aspirine. On a 95 % de chance de détecter un EIM ayant une fréquence de 1/10.000, en surveillant 30 000 sujets traités.
Or Le nombre total de sujets inclus dans les essais cliniques ne dépasse pas les 5000 personnes. La durée d’observation des patients est courte. On ne pourra détecter que les effets indésirables fréquents, liés à l’action pharmacologique du médicament (effets de type A). Par ailleurs, les sujets à risque sont écartés : l’enfant, le vieillard, la femme enceinte, l’Insuffisant rénal et l’Insuffisant hépatique. Nous n’avons aucune information sur les effets d’une prise chronique .Vu le déroulement en milieu hospitalier, on ne pourra se faire une idée des conditions normales d’utilisation : interaction médicamenteuse, alimentaire, photo toxicité,etc…
Après Commercialisation
La détection des effets indésirables sera maximale au cours de la première année de lancement du produit. Plusieurs approches seront mises à contribution pour dépister les effets indésirables des médicaments.
- La Notification spontanée des effets indésirables par les professionnels de santé à un centre de pharmacovigilance est considérée à l’unanimité comme étant la méthode la plus efficace, la moins coûteuse et la plus pratique pour détecter des effets indésirables encore inconnus. Elle présente également l’avantage de surveiller de façon continue tous les médicaments anciens et nouveaux. L’analyse des retraits du marché français de médicaments pour raison de pharmacovigilance sur une période de 6 ans a montré que la notification spontanée a un rôle majeur, non seulement dans la détection de signaux (effet indésirable ayant attiré l’attention par sa nouveauté ou par sa fréquence d’apparition) de pharmacovigilance, mais aussi dans le recueil de preuves pour le retrait du marché de médicament (3). Il faut cependant tenir compte des limites de tout système de notification spontanée, en particulier de l’importance de la sous notification.
- Les Etudes pharmaco épidémiologiques, sont incontournables pour valider les signaux détectés par le biais des notifications spontanées. Elles sont Utilisables une fois l’hypothèse de relation de cause à effet formulée. Leurs limitations résident dans le fait qu’elles vont cibler un seul médicament, sont souvent trop coûteuses, trop longues et non adaptées aux situations d’urgence.
- Les Etudes de type « Prescription Event Monitoring « (PEM):
Cette approche est très utilisée en Grande Bretagne pour la détection d’effets indésirables d’un nouveau médicament. Il s’agit d’un type particulier de cohorte qui comprend en moyenne 10 000 patients exposés à un nouveau médicament, au cours de laquelle chaque sujet sert de propre témoin pendant et après exposition au produit.
Les matériaux invoqués sont les dossiers médicaux des cabinets de généralistes. Dès qu'un patient fait remplir la première ordonnance à la pharmacie, l’enquêteur en est averti par télématique par la Prescription Pricing Authority(caisse de remboursement) permettant d'identifier le généraliste et le patient. Six mois plus tard l'enquêteur expédie un courrier aux prescripteurs généralistes et leur demande alors de recopier volontairement et bénévolement sur une « carte verte » la liste des événements médicaux déjà notés dans le dossier médical durant les 6 mois depuis la première ordonnance. Cette méthode s'est avérée utile pour quantifier quelques EIM déjà connus et ainsi rassurer les commanditaires, les prescripteurs et les autorités. Mais elle est moins utile que la notification spontanée pour détecter les effets indésirables et les signaux, une des raisons évoquées serait le faible pourcentage des médecins répondeurs.
NATURE DES EFFETS INDESIRABLES MEDICAMENTEUX
Les effets indésirables des médicaments ne présentent aucune spécificité d’organe, et de ce fait, ils peuvent prendre l’allure de divers symptômes. Certains systèmes ou organes semblent plus fréquemment atteints que les autres tels que la peau, le Système nerveux
le système hématologique et le système gastro intestinal(2) .
Les EIM se manifestent sous forme de réactions aiguës, mais peuvent évoluer vers une pathologie chronique.
FRÉQUENCE DES EFFETS INDESIRABLES
Un effet indésirable est défini comme fréquent si son taux de fréquence au sein de la population est supérieur à 5%, occasionnel s'il se situe entre 0.1% et 5% et rare s'il est inférieur à 0.1%(4).
CLASSIFICATION DES EFFETS INDESIRABLES MEDICAMENTEUX
Classification des EIM Selon Leur mécanisme d’action
La classification ABC, tenant compte du mécanisme d’action impliqué dans la survenue de l’effet indésirable a été proposée par Rawlins and Thompson en 1977(5).Elle envisage 3 types d’effets indésirables :
Les effets de Type A par référence au terme anglais « Augmented », sont dose dépendants et répondent à un mécanisme d’ordre pharmacologique.
- Ces effets peuvent résulter de perturbations pharmacocinétiques aboutissant à un effet toxique du médicament en rapport soit avec l’exagération de l’effet thérapeutique par modification des concentrations du Produit au niveau de leur site d’action (Exemple : Hypoglycémie sous hypoglycémiants oraux) ou bien par son accumulation au niveau de certains organes cibles (Exemple : Ototoxicité des Aminosides).Ces effets sont les plus fréquemment observés et détectés au cours des essais cliniques pour la plupart d’entre eux.
Les facteurs de risques des effets pharmacocinétiques sont représentés par l’age aux 2 extrêmes (enfant et vieillard), l’insuffisant rénal et hépatique ainsi que les interactions médicamenteuses.
- Les effets de type A peuvent être en rapport avec l’activité pharmacodynamique du médicament.La réaction observée est soit liée à l’effet principal du produit (Ex : Cytopénie sous Antimitotiques),
Ou bien sont en rapport avec son effet latéral (Ex : Sécheresse bouche sous Antidépresseurs tricycliques, antihistaminiques, Neuroleptiques phénothiaziniques liée à l’activité anticholinergique de ces médicaments).
- Les modifications pharmaceutiques du produit font également partie des réactions de type A.
(Ex : la Modification des paramètres de libération du KCL induisent une toxicité oesophagienne )
Conduite à tenir face à un EIM de type A :
Etant donné qu’il s’agit d’effets indésirables dose dépendant une diminution de la dose peut les corriger. Pour certains produits, un dosage plasmatique pour ajustement posologique est recommandé notamment pour les médicaments ayant une marge thérapeutique étroite (lithium, théophylline, digitaliques…..). L’arrêt définitif du médicament est rarement envisagé sauf quand il s’agit d’un effet difficile à gérer
(Ex : Toux rebelle sous inhibiteurs de l’enzyme de conversion).
Les Effets de Type B par référence au terme anglais « Bizarre », sont liés à l’individu, ils peuvent être d’ordre Immunoallergique ou non :
- Les réactions immunoallergiques nécessitent une sensibilisation de plusieurs jours ou bien surviennent lors d’une nième prise. Elles peuvent être immédiates ou retardées.La Ré administration du médicament entraîne une récidive souvent plus grave.Leur prévision est impossible avant l’AMM.Ces réactions ont une faible fréquence d’apparition et ne sont pas dose dépendantes.
- Parmi les réactions non immunoallergiques on retrouve :
- la réaction pseudo anaphylactique simulant une réaction allergique .Elle est due à la libération directe d’histamine secondaire à la dégranulation des basophiles,non liée à une réaction Antigéne –Anti corps ,donc en l’absence de sensibilisation préalable. Elles sont peu fréquentes et non doses dépendantes.
Les médicaments les plus souvent impliqués dans ce type de réaction sont :
En Médecine, l’idiosyncrasie désigne une disposition personnelle particulière, généralement innée, à réagir à l'action des agents extérieurs, physiques ou chimiques.
En Pharmacovigilance, on l’évoque devant une réaction qualitativement anormale (génétiquement déterminée), non liée à une action pharmacologique. Elle peut simuler une réaction d’hypersensibilité, mais n’implique pas un mécanisme immunologique. Leur prévision est impossible avant l’AMM. Ces réactions sont rares et non doses dépendantes.
(EXEMPLE : Hyperthermie maligne sous anesthésie générale , dont la fréquence est de 1 cas pour 15 000 patients traités , ayant un caractère familial , le mécanisme invoqué serait une augmentation idiopathique du calcium sarcoplasmique? )
Conduite à tenir face à un EIM de type B :
Au plan individuel, l’arrêt définitif du médicament impliqué est de règle. L’Établissement d’une liste d’éviction des produits susceptibles de déclencher ce type de réaction est préconisé.
A l’échelle populationnelle, le retrait du médicament impliqué s’impose quand la fréquence de survenue de l’EIM devient préoccupante.
Ex : retrait du Glifanan® pour chocs anaphylactiques en 1991.
Les réactions de Type C par référence au terme anglais
« Continuous », elles surviennent après la prise chronique d’un médicament. Elles témoignent de l’augmentation statistique de la fréquence d’une maladie spontanée coïncidant avec la consommation au long cours d’un médicament. De ce fait, la relation de cause à effet est souvent difficile à établir car la chronologie d’apparition par rapport à la prise du médicament est non suggestive (retardée).Le mécanisme est souvent indéterminé. Ce type de réaction est qualifié d’atypique avec la possibilité de nombreux facteurs de confusion dans l’analyse de la relation de cause à effet entre la prise du médicament et la survenue de l’EIM. Ces réactions sont rares et non doses dépendantes.
Exemples :
Conduite à tenir face à un EIM de type C :
Au plan individuel, on procède à l’arrêt définitif du médicament impliqué.
A l’échelle populationnelle, ce type de réaction n’implique généralement pas le retrait du médicament impliqué.
Classification des EIM Selon Leur prévisibilité :
Les Effets indésirables médicamenteux attendus ou prévisibles concernent les réactions de type A, les interactions médicamenteuses.
Les Effets indésirables inattendus ou imprévisibles incluent les réactions de type B, les réactions liées à un Polymorphisme génétique avant son investigation.
Classification des EIM selon la gravité
- L’EIM grave qualifie un effet indésirable a l’origine : d’un décès, d’une menace pour la vie du patient au moment de l’apparition de l’événement, d’une nécessité d’hospitalisation ou d’une prolongation d’hospitalisation, de séquelles ou incapacité notable et durable (incapacité signifiant toute impossibilité à réaliser des gestes de la vie courante), d’une anomalie congénitale ou d’une atteinte périnatale,
Conduite à tenir face à un EIM grave
Selon les Bonnes Pratiques de Pharmacovigilance du Maroc (6)
« Tout effet indésirable grave doit faire l’objet d’une notification immédiate dans les 24 heures au centre National de Pharmacovigilance » Modalités de notifications des effets indésirables des produits de santé par les Professionnels de santé Bonnes Pratiques de Pharmacovigilance p 19; 2004
- L’ EIM sévère concerne un effet indésirable nécessitant en plus de l’arrêt du médicament des soins supplémentaires.
- L’ EIM modèré, banal est un effet indésirable qui n’est ni sévère, ni grave
Classification des EIM selon leur évitabilité
La notion d’évitabilité a été récemment introduite en pharmacovigilance, elle tente de dénombrer et décrire les effets indésirables médicamenteux pouvant être prévenus afin de diminuer le risque médicamenteux. Une méta analyse portant sur 15 études a évalué le taux de prévalence des admissions hospitalières à 4.3% avec une évitabilité moyenne de 59%(7).Plusieurs méthodes de mesure de l’évitabilité des EIM sont disponibles cependant aucune d’entre elles n’a jusqu’à présent été validée .A cet effet, une équipe de spécialistes Français (7) a établi une échelle de mesure validée proposant 4 items pertinents et représentatifs du concept d’évitabilité avec une cotation en 4 catégories ( évitable, potentiellement évitable, inévaluable, inévitable).
Les 4 items proposés portent sur :
-Item A : le respect des recommandations du médicament conformément aux informations contenues dans le Vidal de l’année de la dernière prescription ou celles diffusées par l’AFSSAPS,ou celles rapportées dans la notice patient en cas d’automédication.
- Item B :la présence d’autres facteurs de risques identifiés chez le patient,en dehors de ceux décrits dans le Résumé des Caractéristiques du Produit du Vidal.Par exemple l’age du patient.
- Item C : L’Adaptation de la prescription aux conditions de vie et à l’environnement du patient (profession, présence d’un auxiliaire de vie pour le sujet, problème de vue du patient…..)
- Item D : le côté incontournable ou non de la prescription ou de l’automédication.
FACTEURS DE RISQUE DES EIM
On parle de “facteur de risque” d’une maladie lorsqu’il n’est pas possible de définir une cause unique responsable de sa survenue. Plusieurs facteurs de risque sont impliqués dans la survenue d’EIM :
Lies à l’individu
Les Ages extrêmes :
- La période périnatale constitue une phase de sensibilité à de nombreux médicaments. Les mécanismes en cause sont divers, impliquant :
- la modification des processus d’absorption
- un retard d’élimination des médicaments qui expose à un risque potentiel de surdosage.
- L’immaturité de la barrière hémato-encéphalique impliquant sa sensibilité aux anesthésiques, à la morphine avec un risque d’ictères nucléaires expliqués par un déplacement de la bilirubine de ses sites de liaison par des médicaments co-prescrits (sulfamides).
- L’immaturité des enzymes de biotransformation pouvant exposer à des effets mortels tels l'immaturité de la glycuroconjugaison expliquant les manifestations graves d'intolérance au chloramphénicol (Grey baby syndrome) chez le nouveau-né.
- Le tissu osseux en croissance séquestre des médicaments ou des toxiques
- Les particularités biochimiques du globule rouge prédisposent le nouveau né à des hémolyses médicamenteuses.
- Le sujet âgé, du fait essentiellement de la diminution de l’excrétion rénale par abaissement de la filtration glomérulaire et de la polymédication représente un terrain de prédilection de survenue des EIM.
Les facteurs génétiques
La majorité des sites d’action et de transformation des médicaments étant soumis à un déterminisme génétique, un polymorphisme peut être à l’origine de grandes variations, selon les individus, dans le métabolisme ou la réponse à un médicament donné.
Ex : La capacité d’acétylation hépatique permet de distinguer 2 types d’individus au sein d’une même population, les acétyleurs lents et les rapides. Ceci est important pour l’isoniazide et rend compte de la survenue d’une atteinte hépatique chez les acétyleurs rapides qui produisent par excès le métabolite hépatotoxique (N acétyl isoniazide).Les acétyleurs lents de l’isoniazide vont développer volontiers une neuropathie périphérique par accumulation de l’isoniazide dans l’organisme à l’origine d’un déficit en vitB6. D’où la nécessité absolue d’un phénotypage d’acétylation chez les sujets traités par l’isoniazide afin d’adapter la posologie.
La validation clinique d’un grand nombre de tests pharmacogénétiques et la mise au point de nouvelles technologies très performantes de génotypage devraient rapidement contribuer à un développement accru de la pharmacogénétique dans la pratique médicale courante, avec la perspective d’une individualisation des traitements médicamenteux »traitement à la carte ».
La pathologie associée
L’insuffisance Hépatique et l’insuffisance rénale représentent les terrains de prédilection dans l’apparition de la toxicité des médicaments : L’atteinte hépatique va induire des perturbations du métabolisme du médicament avec une augmentation de la forme libre du médicament par diminution de leur fixation aux protéines (hypo albuminémie).L’Insuffisance Rénale sera à l’origine de l’accumulation du produit.
Liés au médicament
Les risques liés au médicament peuvent se situer au stade de la fabrication du principe actif, ou bien lors de la préparation pharmaceutique (erreurs d’excipients ; pouvoir allergisant de certains colorants, édulcorants ou conservateurs ; contamination par des germes pathogènes des solutés injectables).Une mauvaise conservation peut aboutir à la transformation en dérivés toxiques comme cela a été décrit avec les tétracyclines.
Lies à l’environnement
L’exposition au soleil favorise l’apparition de réactions de phototoxicité ou de photosensibilisation. L’alimentation peut interférer avec le métabolisme de certains médicaments, telle la survenue d’accidents hypertensifs sous IMAO lors de la prise d’aliments riches en tyramine (certains fromages).
L’activité professionnelle peut dans certaines circonstances exposer à des toxiques (insecticides, hydrocarbures…….) qui interférent avec le métabolisme des médicaments. Certaines professions à risques imposent certaines recommandations lors de prescriptions de sédatifs.
Lies à une Interaction médicamenteuse
En pharmacologie l’interaction médicamenteuse désigne une modification in vivo des effets d’un médicament par un autre médicament, un aliment ou une boisson ou encore par des agents chimiques de l’environnement. 2 % seulement de ces interactions vont s’exprimer cliniquement.
L’interaction médicamenteuse peut être pharmacocinétique, si la seconde substance modifie, à un niveau quelconque, les concentrations tissulaires de la première en accélérant (inducteur enzymatique) ou en ralentissant (inhibiteur enzymatique) son métabolisme hépatique ou son élimination rénale.
Ex : Pilule contraceptive +RIFAMPICINE (inducteur enzymatique) = Grossesse
L’interaction peut être pharmacodynamique, si la seconde substance ne modifie pas la pharmacocinétique de la première mais interagit au niveau de son mécanisme d’action en l’inhibant plus au moins complètement (Antagonisme) ou en le renforçant (potentialisation).
Ex : Morphine + Naloxone (antidote des opiacés) = neutralisation des effets par Antagonisme total
Imputabilité d’un effet indésirable Médicamenteux
En Pharmacovigilance, l’imputabilité est l’estimation du lien de causalité pouvant exister entre un traitement médicamenteux et la survenue d’un événement indésirable chez un patient donné (9).
Plusieurs méthodes ont été proposées pour standardiser la démarche d’imputabilité et réduire la variabilité entre les observateurs. Elles reposent soit sur des approches de type algorithme (méthode Française) soit la théorie des probabilités (méthodes Bayésiennes).La combinaison de ces évaluations permet d’obtenir un score d’imputabilité à plusieurs degrés.
La méthode Française adoptée par le centre Marocain de pharmacovigilance (10), permet l’appréciation du niveau de responsabilité du médicament dans la survenue de l’EIM à partir d’une imputabilité intrinsèque et extrinsèque du cas décrit :
- Imputabilité intrinsèque : cette analyse ne prend en compte que les informations tirées du cas observé. Le score d’imputabilité intrinsèque résulte de l’analyse de 7 critères :
3 critères chronologiques
- Le caractère évocateur du délai de survenue de l’événement indésirable (challenge),
- L’évolution de l’événement en cas d’arrêt du traitement ou de réduction de posologie (déchallenge),
- L’éventuelle réapparition de la symptomatologie en cas de reprise du traitement dans des conditions similaires (rechallenge),
4 critères sémiologiques
- L’absence, après bilan approprié, d’une autre explication évidente à l’événement observé,
- Le caractère éventuellement évocateur de la symptomatologie observée,
- L’existence d’un facteur connu pour favoriser la survenue d’un effet indésirable de ce type,
- Le résultat d’un éventuel examen complémentaire pertinent et fiable pour juger de la responsabilité du médicament dans la survenue de cet événement.
A l’issu de l’analyse de ces critères un score d’imputabilité intrinsèque est attribué aux critères chronologiques et sémiologiques de l’observation s’échelonnant en 4 degrés (I0 : exclus ; I1 : douteux I2 : plausible ; I3 : vraisemblable ; I4 : très vraisemblable).
- Imputabilité Extrinsèque repose sur la recherche dans la littérature de cas similaires décrits avec ce médicament ou des médicaments apparentés. Là aussi la méthode retient score d’imputabilité extrinsèque à 4 degrés s’étendant de 0 (cas jamais décrit après une recherche exhaustive) à 3 (effet notoire largement décrit).
Bibliographie :
1. Lazarou J, Promeranz BH, Corey PN. Incidence of adverse drug reactions in hospitalized patients: A meta-analysis of prospective studies. JAMA1998; 279:1200-5
2. WHO collaborating centre for International Drug Monitoring (UMC). Safety monitoring of medicinal products: guidelines for setting up and running a Pharmacovigilance centre .EQUUS, London, 2000.
3. 25e Journées françaises de pharmacovigilance. Rev Prescrire 2005 ; 25 (265) : 666-677.
4. Morant J, Ruppanner H (eds). Compendium Suisse des Médicaments. Bâle: Documed, 2000
5. Rawlins,M.D and Thomson,J.W.Pathogenesis of adverse drug reactions.In :Textbook of Adverse drug reactions.Davies.D.M.(Ed.)Oxford University Press,1991,pp.18-45.
6. Bonnes pratiques de Pharmacovigilance .Ministére de la Santé.Maroc.Edition Janvier 2004.
7.winterstein AG, Saner BC , Hepler CD et al.Preventable drug related hospital admissions.Ann Pharmacother 2002 ;36 :1238-48
8. Olivier .P, Caron.J,Haramburu , F,Imbs J.L,Jonville –Béra.A.P and al . Validation d’une échelle de mesure : exemple de l’échelle Française d’évitabilité des effets indésirables des médicamenteux.Thérapie2005 Jan-Fev :60(1) :39-45.
9. Fourrier.A,Haramburu.F ,Miremont.G,Moore.N,Rue-Fenouche.C.Dictionnaire de Pharmaco-épidémiologie.Troisiéme édition.ARME –Pharmacovigilance Editions 1998-Bordeaux
10. Begaud B, Evreux JC, Jouglard J et al.Imputabilité des effets inattendus ou toxiques des médicaments.Thérapie. 1985. Vol 40 ; 111-8.