Article N° 7459

NOUVELLES MISSIONS

Journée mondiale de la pharmacie : les pharmaciens marocains n’ont toujours pas le cœur à la célébrer!

Abderrahim Derraji - 25 septembre 2022 21:48

Les pharmaciens célèbrent, le 25 septembre de chaque année, leur Journée mondiale. Il s’agit d’une initiative de la Fédération internationale pharmaceutique (FIP) ayant pour objectif de faire connaître leur apport au système de santé.

Ce rôle a été renforcé lors de la pandémie Covid-19 qui a révélé que les pays ayant impliqué les pharmaciens en leur conférant de nouvelles missions ont pu désengorger leurs structures de soins.

En effet, en plus de leurs tâches habituelles, les pharmaciens ont joué un rôle important dans le dépistage du Sars-CoV-2. Ils ont aussi contribué à la réussite des campagnes de vaccination puisque les pharmaciens d’officine ont administré des doses de vaccin anti-Covid-19 dans une quarantaine de pays. Les officinaux ont également renouvelé des ordonnances arrivées à expiration chez les patients ayant été dans l’incapacité de rentrer en contact avec leur médecin traitant durant les périodes de confinement strict.

Forts de ces expériences, de nombreux pays ne comptent pas en rester là. Leurs pharmaciens se forment, s’organisent et mènent des expériences pilotes en attendant de se voir conférer de nouvelles tâches.

D’ailleurs, lors de son dernier Congrès qui s’est tenu la semaine dernière à Séville en Espagne, la FIP a exhorté les autorités sanitaires et les donneurs d’ordre à exploiter davantage les compétences des pharmaciens en renforçant leur rôle dans la prévention et en les impliquant dans de nouvelles missions.

C’est également de ces nouvelles missions qu’il a été question lors de la conférence principale du Congrès MPharmaday qui a eu lieu samedi dernier à Rabat. Lors de cette conférence, Dr Hassan Imounachen, past president du Syndicat régional des pharmaciens d’Oujda, a fait un benchmark entre les missions conférées aux pharmaciens au Maroc et dans 11 autres pays : l’Allemagne, la Belgique, le Canada, les Émirats arabes unis, les États-Unis, la France, l’Espagne, les Pays-Bas, le Qatar, le Royaume-Uni et la Suisse.

Dans 7 pays sur les 11 pays cités, le pharmacien peut pratiquer la substitution. Dans 3 pays sur 11, les prescriptions se font en DCI (dénomination commune internationale). Seule l'Espagne n’autorise la substitution que sous certaines conditions.

Dans 8 pays sur 11, les pharmaciens ont le droit d’administrer des doses de vaccin aux patients. Les pharmaciens belges pourront bientôt vacciner, et seuls le Qatar et les Émirats arabes unies n’autorisent pas les pharmaciens à vacciner.

Neuf pays sur 11 autorisent les pharmaciens à utiliser des TROD et à faire le suivi thérapeutique. Là aussi, seuls le Qatar et les Émirats font exception.

Ce benchmark confirme l’évolution des pratiques officinales à travers le monde comme le préconisent l’Organisation mondiale de la santé et la FIP.

Au Maroc, les beaux rêves que font les étudiants durant leur difficile cursus universitaire se transforment en cauchemar dès qu’ils prennent connaissance de la réalité de l’exercice officinal.

L’absence d’une volonté politique, la rupture de dialogue entre les pharmaciens et la tutelle, les divisions intestines, les dysfonctionnements affectant les élections ordinales et la pression exercée par certaines associations de médecins constituent un réel frein à l’évolution de la pharmacie au Maroc.

Le dernier exemple qui a scandalisé les pharmaciens d'officine est le test Covid-19. Le ministère de la Santé a interdit aux pharmaciens de faire les tests Covid-19. Pire, il leur a même interdit de dispenser les autotests. Bien évidemment, ces tests ont continué à se vendre en catimini et en dehors des pharmacies.

Depuis la promulgation de la Constitution de 2011, des efforts sont déployés pour améliorer l’accès aux soins. Et bientôt, la couverture médicale sera généralisée ce qui va s’accompagner d’une augmentation des dépenses en matière de santé. Pour limiter ces dépenses et garantir la pérennité des caisses, on va devoir mettre en place des mécanismes permettant une gestion optimale des ressources et exploiter au mieux les compétences de tous les professionnels de santé. 

De nombreux pays ont compris, depuis longtemps, que le pharmacien peut constituer un allié de choix pour améliorer la prise en charge des patients tout en réduisant les dépenses en matière de santé. Son implication dans la prévention, le suivi thérapeutique, la vaccination, la substitution (...) ont donné les résultats escomptés.

Au Maroc, rien ne peut malheureusement être fait tant que la profession ne parle pas la même voix et tant que la tension entre les instances professionnelles et l'administration perdure. On comprend que cette dernière puisse refuser de se réunir avec des Conseils de l’Ordre n’ayant pas organisé à temps leurs élections, par contre, les raisons qui la poussent à ne pas débloquer cette situation nous échappent, sachant que le Dahir de 1976 lui confère cette prérogative !

Source : PharmaNews