Article N° 6920

MONCEF SLAOUI

Covi-19 : tous dans la même galère, ou presque!

Abderrahim DERRAJI - 30 novembre 2020 13:11

Moncef Slaoui, éminent chercheur en immunologie et en biologie moléculaire que Donald Trump avait désigné comme «M. Vaccin anti-Covid-19» aux États-Unis, a accordé la semaine dernière une interview à la télévision canadienne(1). Cet entretien a été essentiellement dédié à l’état d’avancement des différents projets de vaccin anti-Covid-19 qu’il «chapeaute», ainsi qu’à la vaccination collective à laquelle se préparent actuellement les États-Unis.

Deux vaccins se trouvent actuellement en pole position aux États-Unis, le vaccin de Pfizer-BioNtech et celui de Moderna. Ces deux vaccins à ARNm pourraient avoir le feu vert de la FDA (Food and Drug administration) avant la fin du mois de décembre 2020.

Tout au long de l’interview, Moncef Slaoui, s’est voulu optimiste, comme il s’est félicité de la prouesse accomplie par les universités, les pharmas et les biotech qui ont pu, en moins d’une année, mettre au point un vaccin efficace à plus de 95%. Quant à sa production, d’après cet expert en immunologie, la vaccination de toute la population reste tributaire de la cadence de production des doses. Plusieurs mois seront nécessaires avant de voir toute la population américaine vaccinée.

Une quarantaine d’autres vaccins sont actuellement en cours de développement ou de production. Ceux qui auront l’approbation des autorités sanitaires, vont permettre le lancement de campagnes de vaccinations collectives à travers le monde. Le défi à relever s'annonce de taille puisqu’il faut produire, distribuer et administrer, en quelques mois, des milliards de doses de vaccin anti-Covid-19 afin de protéger, dans un premier temps, les sujets les plus vulnérables et les plus exposés  en attendant de pouvoir vacciner le reste de la population.

Après cette phase de «gestion des urgences», on va devoir évaluer notre capacité à gérer les crises sanitaires et tirer les leçons pour éviter d'être pris au dépourvu par un Sars-Cov-3 ou un de ses cousins.

Quoi qu’il en soit, cette crise sanitaire a été riche en enseignements. On a compris que le monde est un petit «village» : les micro-organismes ne connaissent pas de frontières ! Un virus apparu en Chine en décembre dernier a fait le tour du monde en quelques mois. À l’exception de certaines petites îles isolées, le Sars-Cov-2 a touché tous les pays. Par conséquent, toute stratégie future de lutte contre les épidémies devrait intégrer une dimension régionale et internationale.

Cette épidémie a aussi révélé au grand jour qu’une crise sanitaire qui dure dans le temps peut être aggravée par une crise économique plus compliquée à gérer. En d’autres termes, chaque pays devrait comprendre qu’une économie aussi solide soit elle ne vaut rien, s'il n’est pas capable de protéger la santé de tous ses habitants.

Durant cette crise, on a aussi constaté que les pays disposant d’une industrie leur permettant de répondre à leurs besoins, notamment en médicaments et en dispositifs médicaux, ont eu moins de mal à faire face à la crise sanitaire. Quant aux autres pays, y compris les plus nantis, ils n’avaient d’autre choix que d’attendre que ces pays se servent avant d'envisager d'honorer leurs commandes.

À quelques semaines du démarrage des campagnes de vaccination contre la Covid-19, on a aussi compris qu’il est primordial de s’investir dans la recherche clinique et de mettre en place des rapprochements à même de renforcer les collaborations internationales. Sans une telle approche, on réduit à néant nos chances de voir éclore dans notre pays des unités de production de vaccins ou d'autres produits de santé aptes à répondre aux besoins du Royaume et à ceux des pays africains voisins.

Pour conclure, on ne peut s’empêcher de penser au retard pris par différents projets dont la finalité était de faire du Maroc un hub pharmaceutique à l’échelle du Continent. La crise sanitaire actuelle devrait, en principe, nous inciter à revoir nos priorités et à mettre les bouchées doubles pour que les projets d’investissements dans le secteur pharmaceutique puissent se concrétiser dans des délais raisonnables.
1 Lien : https://www.youtube.com/watch?v=AOIVR0afM4U

Source : PHARMANEWS