Article N° 6479

DIGITAL

Un train peut en cacher un autre !

Abderrahim DERRAJI - 23 septembre 2019 09:30

Le rideau vient de tomber sur la troisième édition de Mpharma Day qui s’est tenue le samedi dernier au Centre national des sports Moulay Rachid avec comme thématique principale «La pharmacie à l’ère du digital». Cette thématique peut sembler, de prime abord, en total décalage avec la réalité de la pratique officinale au Maroc, mais en réalité, il n’en est rien.

Certes, la profession est préoccupée par l’érosion des revenus des pharmaciens et particulièrement depuis la publication en 2013 du Décret de fixation du prix des médicaments. Ce texte, qui a malheureusement apporté de mauvaises solutions à de vraies problématiques, a mis à mal tout le secteur pharmaceutique. Les vagues de baisses de prix des médicaments qui se succèdent n’ont pas eu l’effet escompté puisqu’ils n’ont eu aucune incidence sur l’amélioration de l’accès aux médicaments. Pire, si l’administration ne rectifie pas le tire et à temps, la politique de régulation des prix des médicaments finira par priver nos concitoyens d’un grand nombre de spécialités pharmaceutiques. 

De toute évidence, les pharmaciens ne peuvent pas rester passifs vis-à-vis de cette situation. Mais, ils ne doivent pas, non plus, rester obnubilés par ce dossier et faire table rase sur tout le reste. Il suffit de voir ce qui se passe actuellement en France, malgré les difficultés et les faillites qui se succèdent, les pharmaciens français et leurs instances ne se sont jamais avoués vaincus. Les fruits de leurs efforts sont là puisqu’ils se sont vu conférer de nouvelles missions et de nouveaux services malgré la résistance des médecins. Rien que ce mois-ci, les pharmaciens français ont «décroché» un avenant qui prévoit une rémunération pour les téléconsultations faites à partir des officines et une autre pour les tests rapides d’orientation diagnostique (TROP-Angine). Ces services viennent s’ajouter au suivi des anticoagulants, à la vaccination, etc.

Il va sans dire que la rémunération doit être revue de fond en comble, les «mesurettes» ne vont pas permettre d’extirper le pharmacien de ses difficultés économiques. Mais, il est aussi primordial de se pencher sur la formation de base et la formation continue et sur les moyens de valoriser l’exercice officinal tout en veillant au respect des lois en vigueur. La profession devrait également étudier les moyens de mettre en place de nouveaux services et de nouvelles missions à confier au pharmacien. Et pour finir, la profession ne peut pas non plus ignorer la révolution digitale qui est en train de s’emparer de tous les secteurs. À l’ère de l’uberisation, les consommateurs ultra-connectés sont à la recherche de nouveaux services leur permettant de consommer autrement et les acteurs de la distribution n’attendent que l’occasion pour leur offrir ces services. Ces acteurs livrent une bataille pour pouvoir distribuer les médicaments à prescription facultative et ils ne vont certainement pas s’arrêter là !

L’adaptabilité des pharmaciens est aujourd’hui mise à rude épreuve. Ils vont devoir entamer une vraie mue tout en sauvegardant le cœur de leur métier. Et comme l’a si bien dit Charles Darwin : «Les espèces qui survivent ne sont pas les espèces les plus fortes, ni les plus intelligentes, mais celles qui s’adaptent aux changements».

Source : PMA