Article N° 6402

PRIX DU MÉDICAMENT

Le bon sens n’a point de prix !

Abderrahim DERRAJI - 16 juin 2019 22:41

Depuis le 18 décembre 2013, date de la publication du Décret 2-13-852 relatif aux conditions et aux modalités de fixation du prix public de vente des médicaments fabriqués localement ou importés, les baisses des prix des médicaments se succèdent à un rythme effréné. En dehors de quelques rares exceptions, les prix de la majorité des références commercialisées au Maroc sont bas.

En effet, depuis l’adoption du benchmark pour définir le prix des médicaments en se référant à sept pays et d’un nouveau mode de décrochage du prix du médicament générique, on assiste à un nivellement vers le bas des prix de la quasi-totalité des spécialités pharmaceutiques commercialisées au Royaume. Le renouvellement des Autorisations de mise sur le marché (AMM) est devenu synonyme de baisses des prix, même si la logique aurait voulu que l’application du Décret 2-13-852 soit faite dans les deux sens : la baisse et la hausse. Sans cet ajustement, on prend le risque de compromettre la rentabilité de certains produits, voire leur disponibilité.

Du temps du prédécesseur d’Anas Doukkali, les baisses des prix des médicaments étaient annoncées en grande pompe. Quant aux demandes d’augmentation, elles finissaient par se perdre dans les méandres d’une administration omnibulée par les baisses. Il a fallu que certains médicaments soient sur le point de disparaître du marché pour que le ministre de la Santé actuel autorise le réajustement du prix de 14 médicaments essentiels. À titre d’information, plus de 3.000 médicaments ont connu une baisse de prix depuis 2013.

Ces baisses, qui ont accentué la vulnérabilité de tous les maillons du secteur pharmaceutique, n’ont finalement pas eu l’effet escompté. La consommation moyenne annuelle des Marocains en médicaments, aussi bien en unité qu’en valeur, n’a quasiment pas changé. Et comme nous l’avons maintes fois martelé dans nos écrits, le seul levier pouvant améliorer l’accès aux médicaments reste la couverture médicale.

Nous n’avons pas manqué, non plus, de plaider en faveur de l’ajustement des prix de certains médicaments pour éviter de les voir disparaître du marché. Ceci est particulièrement vrai pour les produits ne disposant pas d’alternative thérapeutique, à l’image de la seule spécialité commercialisée au Maroc à base d’acénocoumarol. Cet anticoagulant a failli disparaître du marché en raison d’un ajustement de 2DH demandé par le producteur.

Bien souvent ceux qui critiquent les hausses des prix des médicaments, le font de bonne foi et croient bien faire. Mais en réalité, et tous les pharmaciens vous le diront, le malade craint beaucoup plus la non-disponibilité d’un médicament qu’une augmentation de quelques dirhams par boîte. 

Aussi, on espère que la logique et le bon sens finiront par tordre le cou à la démagogie et au populisme. Dans le cas contraire, les «qu'en-dira-t-on» finiront pas nous imposer des solutions qui ne sont pas forcément dans l’intérêt de nos patients !

Source : PharmaNEWS 496