Article N° 6162

PHARMACIE

Désormais, la pharmacie ne sera plus ce qu’elle était !

Abderrahim DERRAJI - 22 octobre 2018 11:47

La Commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale (France) a adopté, mercredi dernier, un amendement au projet de loi de financement de la Sécurité sociale autorisant les pharmaciens d’officine à dispenser, d’eux-mêmes, des médicaments à prescription médicale obligatoire. Cette expérimentation sera menée dans deux régions de France pendant une période de trois ans.

Cet amendement, qui sera débattu au parlement, est en phase avec la politique du gouvernement qui cherche, par tous les moyens, à étendre les délégations de compétences en vue de "libérer du temps médical" pour lutter contre les déserts médicaux.

Le rapport élaboré par les trois délégués à l'accès aux soins désignés par la ministre des Solidarités et de la Santé, Agnès Buzyn, définit un «panier de soins de base» et confie au pharmacien le soin de dispenser les premiers traitements. Ces services existent déjà en Suisse, pays où un pharmacien sur cinq prend en charge certaines maladies bénignes, notamment la cystite, la conjonctivite ou encore l'eczéma.

Les pharmaciens français vont agir dans le cadre d'un protocole médical et de coopération, conclu avec le médecin traitant et les communautés de santé locales. Et comme l’a annoncé le Président de la République, Emmanuel Macron, l’exercice libéral isolé qui prévaut actuellement en France devrait, d’ici 2021, faire place aux Communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS).

Les pharmaciens français se voient obligés de réinventer un nouveau modèle économique qui prévoit des honoraires à la place de la marge habituelle, ainsi que de nouvelles missions comme la vaccination contre la grippe qui pourra être faite par les pharmaciens dans toutes les régions de l’Hexagone dès octobre 2019.

À l’instar des pharmaciens canadiens et suisses, les pharmaciens français qui ont mené avec succès plusieurs expérimentations sonnent le glas à un exercice officinal qui s’est embourbé dans des approches dictées par le souci de rentabilité qui les a, peu à peu, éloignés du cœur de leur métier.

On ne peut s’empêcher de faire le parallèle avec les pharmaciens marocains dont les difficultés devraient, en principe, les pousser à eux aussi, à entamer leur mue et évoluer vers un modèle économique garantissant la pérennité de leur profession.

Malheureusement, la pratique officinale au Maroc s’est éloignée, au fil du temps, du cadre juridique prévu pour la réglementer. Le pharmacien prend en charge une bonne partie des patients ne disposant pas de couverture médicale, comme il prend en charge ce qu’on appelle communément la «bobologie». Seulement, aucun encadrement spécifique n’est fait dans ce sens et la limite entre ce qui est autorisé et ce qui est interdit n’est pas évidente pour tous.

Aussi, nous pensons que la pratique officinale devrait être évaluée en profondeur avant d’envisager une évolution des pratiques. Nos instances devraient, dans l’intérêt du malade et de la profession, élaborer un projet permettant au pharmacien d’envisager certaines missions sans empiéter sur l’exercice de la médecine. Ceci ne peut être envisagé sans une formation spécifique et sans concertation avec nos confrères médecins. Et bien évidemment, cette approche ne peut être envisagée sans l’exercice personnel de la pharmacie.

Source : PharmaNEWS 461