Article N° 6073

MÉDECINE PRÉDICTIVE

Les limites de la médecine prédictive

Abderrahim DERRAJI - 02 juillet 2018 23:59

La ville de Paris a abrité, le week-end dernier, le quatrième Congrès de médecine prédictive et personnalisée. Cette manifestation organisée par la Société française de médecine prédictive et personnalisée (SFMPP) a pour objectif d’évaluer le bénéfice médical et les bonnes pratiques de tests génétiques prédictifs pour améliorer le dépistage, la prévention et les traitements.

En effet, et comme l’a rappelé le professeur Pascal Pujol(*), ces techniques peuvent déceler une forte probabilité de survenue d’une maladie pour laquelle nous disposons de stratégies de dépistage et de prévention utiles et efficaces.

D’après ce chef du service oncogénétique au CHU de Montpelier, une demande spontanée d’une personne en bonne santé souhaitant connaître un risque potentiel d’être touchée par une maladie donnée, ne peut bénéficier, aujourd’hui, d’une suite favorable. Par contre, deux cas de figure peuvent bénéficier d’une analyse prédictive. Il s’agit de patients ayant des antécédents familiaux de maladies génétiques les exposant à un risque génétique important, ou des patients admis dans le cadre de la prise en charge d’une pathologie donnée et qui découvrent fortuitement un risque génétique.

Toute la question aujourd’hui est de savoir si on doit ou pas prendre en compte cette possibilité de prévoir chez deux parents bien portants la possibilité d’avoir un enfant souffrant d’une maladie grave comme l'amyotrophie spinale infantile. Cette pathologie incurable et redoutée par tous les parents, est à l’origine de graves souffrances aussi bien pour eux-mêmes que pour leurs enfants qui décèdent, dans 9 cas sur 10, avant l’âge de 2 ans.

La médecine prédictive, qui permet de prévoir un risque important de survenu de cette pathologie, met le clinicien ou le biologiste devant un dilemme. Doit-il informer les parents du risque ou pas ? Et surtout dans quelles conditions peut-il le faire ? Leur consentement éclairé est primordial dans ce cas.

Bien qu’on puisse assister à des dérives mercantiles ou à une quête d’eugénisme, le recours à ces analyses génétiques pourrait trouver son indication dans la prévention de plusieurs maladies comme certains cancers du sein dont la prise en charge peut être envisagée d’une manière précoce.

Mais en réalité, le plus difficile reste à trouver un consensus et arrêter des recommandations pour savoir ce qui doit être fait à chaque fois que des analyses génétiques fiables révèlent que des parents ont un risque très élevé d’avoir un enfant atteint d’une maladie génétique très grave. La méconnaissance du risque ou des considérations religieuses peuvent rendre ce choix particulièrement difficile.

(*) Émission de France Inter «Le grand entretien» diffusée le 29 juin 2018.
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Source : PHARMANEWS