Article N° 6047

AÏD AL ADHA

Putréfaction de la viande de mouton : et si le Minidril® n'y était pour rien ?

Abderrahim DERRAJI - 04 juin 2018 11:54

Le ministère de l’Agriculture, de la pêche maritime, du développement rural et des eaux et forêtsa a annoncé dans un communiqué qu’une réunion a eu lieu, le 1er juin 2018, en présence du président du Conseil national de l’Ordre des pharmaciens (CNOP) accompagné de deux membres de son bureau. Cette réunion avait pour but de se pencher sur la dispensation des médicaments vétérinaires par les pharmaciens durant la période d’engraissage qui va précéder le prochain Aïd Al-Adha.

Selon ce même communiqué, certains éleveurs utilisent, en toute illégalité, des substances pour accélérer l’engraissage des moutons avant de les mettre en vente.

À la suite de cette rencontre dont l’objectif était d’éviter le phénomène de «putréfaction» des carcasses de moutons qui seront égorgés cette année, le CNOP s’est engagé à sensibiliser les pharmaciens à ne pas délivrer des médicaments vétérinaires comme des «anti-inflammatoires» sans une ordonnance du vétérinaire et de ne pas répondre favorablement à toute commande «d’anabolisants», de Minidril® ou d’un de ses équivalents.

Le Conseil s’est engagé, par ailleurs, à inciter les pharmaciens qui reçoivent de telles commandes à en aviser l’Office national de sécurité sanitaire des produits alimentaires (l’ONSSA) pour qu’il prenne les mesures qui s’imposent.



Pour rappel, selon un communiqué officiel de l’ONSSA daté du 5 septembre 2017, les analyses microbiologiques effectuées l’année dernière par l’Office indiquaient que le changement de couleur et l’odeur qui se dégageait de la viande étaient dus à une contamination bactérienne de type pseudomonas et clostridies. La coloration superficielle de la viande était due aux pseudomonas. Quant aux clostridies, ils ont été à l’origine de la contamination profonde, provenant de l’appareil digestif de l’animal.

Cette problématique bien réelle et inquiétante n’est que la partie visible de l’iceberg. En effet, l’appât du gain pousse certains éleveurs peu scrupuleux à recourir à toutes sortes d'aliments, médicaments et produits chimiques licites ou illicites pour soigner ou engraisser leurs animaux, sans nullement se soucier des graves conséquences qu’ils puissent avoir sur la santé des consommateurs.

Faut-il encore le rappeler ? À part quelques exceptions, les pharmaciens ne délivrent presque plus de médicaments vétérinaires. Au Maroc, ce, sont les vétérinaires qui cumulent la prescription et la dispensation de ces spécialités pharmaceutiques.

Le communiqué du président du CNOP qui a suivi la réunion avec le ministère de l’Agriculture, Aziz Akhannouch, devrait suffire pour que les pharmaciens continuent à traquer tout usage déviant des contraceptifs oraux, anabolisants et anti-inflammatoires stéroïdiens durant les mois à venir.

Cependant, on peut légitimement se demander si une telle mesure suffira, à elle seule, à mettre nos concitoyens à l’abri des «moutons putréfiés». Rien n’est moins sûr ! En effet, le recours à une alimentation non destinée initialement aux moutons, les trafics de médicaments vétérinaires de contrebande et l'usage inapproprié des médicaments risquent de perdurer. De même, la majorité des Marocains continuera à consommer, durant cette fête, la viande du mouton sans que celle-ci fasse l’objet d’un contrôle vétérinaire. N'est-il pas là le vrai danger ?

Source : PharmNEWS444