
Nous
nous contentons, dans cette
rubrique, de résumer quelques
articles de presse que nous jugeons
intéressants ou importants. Notre
rédaction n'approuve pas forcement
le contenu de ces articles.
L’acide hyaluronique, la molécule
anticancer des rats-taupes nus
(1)
Pourquoi le rat-taupe nu peut vivre
jusqu’à 32 ans, alors que la souris,
cousin de même taille, ne dépasse
pas 4 ans. Quel est son secret ?
Une étude menée par Vera Gorbunova,
de l’université de Rochester, dans
l’État de New York, pourrait bien
apporter des éléments de réponse
plus que prometteurs. Il semblerait
que ce mystère réside du moins en
grande partie dans une molécule :
l’acide hyaluronique.
Comme la souris, l’être humain en
produit également naturellement. Il
se retrouve dans la matrice
extracellulaire, lubrifie les
articulations et joue un rôle
essentiel dans la peau et le
cartilage. Mais la forme présente
chez le rat-taupe nu est différente
et cinq fois plus lourde que celle
retrouvée chez l’Homme.
En 2009, Andrei Seluanov, l’un des
coauteurs de ce travail, remarquait
que les cellules de soutien des
rats-taupes nus élevées in vitro ne
s’aggloméraient pas comme celles des
souris ou des Hommes, mais qu’au
contraire, elles gardaient leur
distance. Avec le temps, le milieu
devenait même particulièrement
visqueux, ce qui empêchait les
scientifiques de travailler
confortablement.
Ils ont alors retiré cette substance
gluante et les cellules sont
progressivement devenues tumorales.
Évidemment, les chercheurs ont voulu
découvrir ce que la substance
contenait, et ils y ont découvert
une forme particulièrement complexe
d’acide hyaluronique, et surtout en
grande quantité. Leurs analyses ont
révélé que l’enzyme chargée de la
morceler était particulièrement peu
active. Était-ce là le secret du
rat-taupe nu ?
Quelques années plus tard, ils
publient dans Nature de nouveaux
éléments confortant leur hypothèse.
Dans cette nouvelle étude, ils ont
exposé ces cellules de rat-taupe nu
à des protéines virales qui
inactivent les gènes suppresseurs de
tumeur. De telles mesures induisent
des cancers chez la souris. Mais pas
chez son cousin africain !
En revanche, lorsque les auteurs ont
inactivé soit la production d’acide
hyaluronique, soit celle de l’enzyme
qui le découpe, les animaux ont
commencé à présenter des tumeurs. La
molécule joue donc un rôle central
dans la protection contre le cancer
chez ces rongeurs.
À partir de quand faut-il
s'inquiéter d'un surpoids?(2)
Pour enrayer l'obésité, l'alerte est
donnée par de nombreux experts. À
juste titre, car le risque de
«surmortalité» est exponentiel, mais
avec les déviations que l'on
connaît: l’idéale minceur et la
norme pondérale érigée en valeur
citoyenne! Or le poids ne se décrète
pas, le culte de la minceur n'est
pas sans conséquences, et la norme
n'est pas biologiquement et
cliniquement pertinente. Même si le
poids des facteurs environnementaux
(alimentation, activité physique,
rythmes…) est primordial dans
l'épidémie d'obésité, ceux-ci n'ont
pas le même impact chez chacun, pour
des raisons multiples, au premier
rang desquelles la génétique
(hérédité) l'épigénétique (l'impact
de l'environnement sur le fœtus in
utero), la flore intestinale…
Certes la génétique suffit rarement
à expliquer la totalité d'une prise
de poids, mais elle explique la
différence entre individus. Si la
minceur est facile à atteindre pour
certains, dans bon nombre de cas,
elle devient pour ceux qui en sont
éloignés un mythe, un mirage
induisant souffrance, frustration,
culpabilité et comportements
restrictifs qui ne sont en général
guère salutaires, sauf pour une
minorité. Dans d'autres cas, cet
idéal minceur confine ou conduit à
l'anorexie.
Quant à la norme, elle est réduc¬trice,
d'une part, car nous sommes
différents, d'autre part, parce que
le risque n'est pas le même pour
tous: trois exemples. Une femme de
31 ans ayant un IMC de 30 kg/m²,
avec une surcharge du bas du corps,
sans autre facteur de risque, n'est
pas menacée pour sa santé
métabolique et cardio-vas¬culaire.
Un homme de 35 ans ayant un IMC de
33 kg/m² actif, sportif, musclé, non
fumeur, ayant une bonne capacité
physique et un poids stable, n'est
menacé que par l'arrêt du sport. Une
femme de 70 ans, enrobée, avec un
IMC de 29 kg/m², ni diabétique ni
hypertendue, ne doit surtout pas
chercher ni à manger moins ni à
maigrir.
Le troisième message étant de ne
plus grossir lorsqu'un niveau
supérieur de poids est atteint, en
sachant que de nombreux régimes
sauvages ou déséquilibrés font le
lit d'une reprise de poids, car ils
sont impossibles à suivre au long
court (sauf structure mentale
obsessionnelle…!)
Les experts traquent la route du
nouveau coronavirus (3)
Réunis au Caire du 20 au 22 juin à
l'initiative de l'Organisation
mondiale de la santé (OMS) – de son
bureau pour la région de la
Méditerranée orientale –,
scientifiques et responsables
sanitaires tentent de comprendre
comment ce virus, inconnu avant
l'alerte de septembre 2012, est
parvenu jusqu'à l'homme.
Vraisemblablement présent à
l'origine chez la chauve-souris, il
aurait pu passer sur des fruits –
des dattes – sur lesquelles seraient
tombées les fientes des chiroptères.
Ou bien trouver un animal hôte
intermédiaire : le dromadaire.
A l'appui de cette hypothèse, les
participants à la réunion du Caire
ont entendu Marion Koopmans, de
l'Institut national de la santé
publique et de l'environnement des
Pays-Bas, expliquer avoir retrouvé
des anticorps contre le MERS-CoV sur
des dromadaires des îles Canaries,
originaires d'Afrique. Autre indice
qui corrobore cette piste – qui
reste à confirmer –, le patient
originaire des Emirats arabes unis
et transféré, le 19 mars dans un
hôpital en Allemagne, où il est
décédé, possédait des dromadaires
dont l'un a été malade.
Les experts demeurent aussi
préoccupés par l'ampleur des
transmissions dans certains hôpitaux
d'Arabie saoudite, notamment dans le
gouvernorat d'Al-Ahsa, dans l'est du
pays. Et s'inquiètent de la
persistance de nouveaux cas au sein
de la population, découverts dans
des endroits de plus en plus
nombreux.
Pour l'instant, l'épidémie n'a
touché qu'un petit nombre
d'individus (68 au total, au 20
juin) mais avec un taux de mortalité
important (56 %). Pour autant, le
scénario d'une diffusion plus large
du virus n'est pas à écarter,
d'autant que l'afflux prévisible de
pèlerins en Arabie saoudite risque
de faire grimper en flèche le nombre
de personnes exposées.
En attendant, des conseils aux
voyageurs ont été publiés sur le
site du ministère. "Les mesures
classiques d'hygiène sont
recommandées pour limiter les
risques de transmission de ce virus,
en particulier le lavage régulier
des mains à l'eau et au savon ou
avec une solution hydro-alcoolique.
Il convient d'éviter tout contact
avec les animaux suspectés d'être le
réservoir ou l'hôte intermédiaire du
virus."
Progéria : découverte d’un
traitement efficace contre le
vieillissement prématuré des artères
(4)
Maladie génétique rarissime, la
progéria ou Syndrome de
Hutchinson-Gilford, se caractérise
par un vieillissement accéléré, dès
les premières années de vie des
jeunes enfants atteints. Jusqu'à
présent, il n’existe aucun
traitement qui permette de soigner
cette pathologie incurable.
Malheureusement, la plupart des
enfants touchés par cette maladie
ont une espérance de vie limitée,
comprise entre 12 et 13 ans. Le plus
souvent, le décès des patients est
lié à une calcification des parois
artérielles, qui entraîne une crise
cardiaque ou un accident vasculaire
cérébral (AVC).
Afin de lutter contre la cause
principale de mortalité chez les
jeunes patients atteints de progéria,
Vicente Andrés et ses collaborateurs
du Centro Nacional de
Investigaciones Cardiovasculares
(Madrid) ont réalisé une étude
comparée des données médicales et
biologiques entre des souris malades
et d’autres, saines. Ils ont aussi
montré que les rongeurs atteints de
progéria présentaient un déficit en
pyrophosphate extracellulaire par
rapport aux témoins. Ce composé
chimique dérivé de l'acide
pyrophosphorique permet de ralentir
la calcification.
Forts de ce constat, les chercheurs
ont mené une expérience permettant
d’augmenter ce taux en pyrophosphate
extracellulaire chez les souris
génétiquement modifiées, afin de
mimer les principaux symptômes de la
maladie humaine. Les résultats ne se
sont pas fait attendre : les dépôts
de calcium au niveau des artères ont
diminué.
Ainsi, s'il est pour l’instant
impossible d’empêcher la progression
et l’issue fatale de la progéria,
l’équipe de Vicente Andrés espère
trouver, dans un avenir proche, un
traitement capable d’augmenter
l’espérance de vie des enfants
atteints en limitant la
calcification des artères.
Reconnaître les pertes de mémoire
liées à Alzheimer(5)
La mémoire repose sur trois étapes,
l'enregistrement, le stockage et la
récupération. Le stockage dépend de
la structure cérébrale elle-même,
car l'information doit être
transcodée dans le langage des
neurones qui vont en conserver la
trace. C'est cette fonction qui est
atteinte au début de la maladie
d'Alzheimer. L'enregistrement dépend
des ressources attentionnelles, et
la récupération de la mise en jeu de
stratégies cognitives
fonctionnelles. Un trouble de
mémoire n'est donc pas forcément lié
à un dysfonctionnement du système de
stockage mais peut aussi être dû à
un trouble de l'enregistrement ou de
la récupération.
«La majorité des personnes de plus
de 50 ans qui se plaignent d'un
trouble de mémoire ont en réalité un
trouble de l'attention. Seul un
petit nombre parmi elle développera
une maladie d'Alzheimer, insiste le
Pr Bruno Dubois, neurologue (CHU
Pitié-Salpêtrière, Paris). Ces
troubles de mémoire sont
majoritairement liés au fait que
nous ne prêtons pas une attention
suffisante à un grand nombre
d'événements sans importance.»
Des troubles de mémoire
attentionnels peuvent être provoqués
par la dépression, le stress
professionnel et l'anxiété, des
troubles du sommeil, une
hypothyroïdie, par la prise de
médicaments (benzodiazépines,
anticholinergiques), le
vieillissement, et probablement
l'hyperstimulation constante dans
laquelle nous baignons. «Ce qui doit
alerter, c'est l'oubli vrai
d'événements marquants ou ayant une
forte charge émotionnelle… Dans 85 %
des cas, l'entrée dans la maladie se
fait par un trouble de la mémoire
épisodique comme l'oubli d'un
événement autobiographique
important.»
En cas de doute, des tests de
mémoire basés sur des listes de mots
à apprendre et à restituer selon un
protocole précis vont chercher à
isoler l'étape responsable de ces
difficultés. Si en mobilisant toutes
les ressources attentionnelles du
sujet, il se souvient de ces mots,
une difficulté de stockage peut être
exclue. S'il en oublie certains mais
arrive à s'en souvenir quand on lui
fournit des indices, ces troubles
sont plutôt dus une difficulté de
récupération, laquelle dépend d'une
région du cerveau, les lobes
frontaux, qui vieillit avec l'âge.
C'est seulement en cas d'échec qu'un
trouble du stockage est envisagé.
Une IRM, révélant la présence des
lésions typiques et l'atteinte de
l'hippocampe, est nécessaire pour
confirmer le diagnostic de maladie
d'Alzheimer.
L'incidence de celle-ci augmente
avec le grand âge, mais on sait que
ces lésions sont présentes très
longtemps avant que la maladie
s'exprime. «Pendant une vingtaine
d'années, des mécanismes basés sur
l'hyperactivité des neurones
restants vont compenser, et la
fonction sera préservée malgré
l'existence des lésions. L'entrée
dans la maladie signe l'épuisement
de ce mécanisme», explique le
neurologue. C'est cette phase de
compensation que le mode de vie peut
moduler, freiner ou accélérer.
«Le développement d'un réseau
synaptique riche, d'une réserve
cognitive importante acquise dès le
plus jeune âge par la lecture, la
stimulation cognitive, ont un effet
protecteur. L'âge venant, c'est
surtout la richesse des interactions
sociales qui sera déterminante»,
souligne le neurologue.
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